Le Festif! de Baie-Saint-Paul 2025 | Jour 2: Simon Kearney, Reyna Tropical, Angine de Poitrine, Enfants Sauvages et Etran de L’Aïr
Le vendredi au Festif! 2025: on revient sur une journée bien chargée, garnie de concerts gratuits, confirmant l’accessibilité à de nombreuses prestations uniques lors de ce week-end. C’est parti!
Photo de couverture: Caroline Perron

Simon Kearney
C’est sous un ravissant soleil que j’ai pris la direction de la Cour à Joanne pour mon premier show de la journée. Pour ceux et celles qui ne sont pas familiers avec les lieux, une scène intime est déposée dans la cour arrière d’une résidante du village. L’espace est verdoyant, parsemé de magnifiques arbres centenaires, et les visiteurs s’y installent au sol ou sur des chaises Adirondack placées en amont. C’est l’endroit idéal où souffler un peu, où commencer une journée, s’enveloppant de la bienveillance d’une prestation simple et par ce lieu des plus accueillants. Un gros bouvier bernois veille sur la cour, alors que des enfants jouent dans l’herbe et que des festivaliers, fatigués de la veille, se permettent, ici et là, un précieux somme.
L’ambiance est donc parfaite pour accueillir un certain Simon Kearney, qui a, à pied levé, accepté de remplacer Yasmin Williams. Le sympathique gaillard est un choix des plus adéquats pour ce concert intimiste. Arpentant son dernier album L’Île et ses chansons indie folk, le jeune homme, seul sur scène, ajoute à la douceur du moment avec son fingerpicking et ses mélodies enjôleuses. Il fait également rire le public attentif avec de nombreuses interventions réussies, comme lorsqu’il annonce qu’il nous jouera son plus grand hit, et que ce sont les accords de Hotel California qui résonnent. Il nous présente finalement sa version Hôtel Sainte-Anne-des-Monts.
Kearney finira, entre autres, son concert avec Maison ouverte, une chanson tellement parfaite pour les lieux, alors que son hôte accueille une centaine de festivaliers, chez elle, visiblement avec le même mantra que le chanteur. « Pas besoin d’déclarer qui vous êtes/Ma maison est ouverte/J’veux pas savoir c’que vous avez faites/Ma maison est ouverte ».

Reyna Tropical
Cette deuxième journée s’est poursuivie après un délicieux sandwich au jambon, avant de prendre la route de la Scène de la Microbrasserie pour aller à la rencontre de Reyna Tropical. En grand nombre, le public s’est donné rendez-vous avec Fabi Reyna, membre fondatrice du groupe, qui a décidé de poursuivre l’aventure, même après le décès de son partenaire Nectali « Sumohair » Díaz en 2022. Sur les planches, l’artiste d’origine mexicaine est flanquée de sa DJ qui balance les productions caliente des chansons que l’on retrouve principalement sur l’album Malegrià. Armée de sa superbe guitare, la chanteuse aligne les notes aériennes et aguicheuses qui les ponctuent et chante en espagnol de sa voix chaude. Même si le thermostat indiquait déjà très chaud, l’artiste basée à Los Angeles a réussi à faire monter le mercure avec sa présence scénique magnétique et le côté lascif de ses chansons aux nombreuses sonorités latines et qui célèbrent les cultures afro-descendantes et queers.
En ce sens, les rythmes colombiens, congolais et péruviens se bousculent dans un torrent de morceaux envoutants et suintants. La communion entre le public de Baie-Saint-Paul et l’artiste qui en était à son premier passage dans la région a eu lieu. Le charme indéniable de Fabi Reyna aura opéré vendredi.

Angine de Poitrine
Après la magie tropicale, direction la caserne de Baie-Saint-Paul afin de me dégoter une des rares places pour le duo masqué de l’heure: Angine de Poitrine. À la vue du public serré au pied de la caserne, j’ai eu une nouvelle certitude. Le groupe unique n’a plus besoin de présentation.
De nombreux visiteurs se sont passé le mot et la caserne était pleine à craquer pour l’occasion. Tellement, que c’était assez difficile de voir les deux rockeurs dans leurs costumes loufoques avec la pente de la caserne qui nous rapetissait de quelques pouces. Ce n’est pas bien grave. Même si les longs nez du duo m’ont échappé, la musique, elle, s’est faufilée jusqu’à mes oreilles. Le rock sinueux a émané de la caserne, au son de riffs musclés aux longues minutes.
Les Saguenéens anonymes sont particulièrement méticuleux. Ils nous entrainent dans leurs longues pièces qui s’emparent de nos corps. Khn et Klec, tous deux de Poitrine, nous invitent dans leur microtonalité expérimentale et on ne peut que s’ébahir devant cette entité unique.

Enfants Sauvages
Enfants Sauvages et le Garage du vieux curé, c’était comme écrit dans le ciel. Le punk hardcore et huileux de la formation menée par l’impressionnante Roxann Arcand s’agençait parfaitement avec les lieux, surtout à la brunante.
C’est alors que des effluves de moteur deux temps se sont invitées à la fête. Je me suis retrouvé, par hasard, derrière la rockeuse confortablement installée sur un gros « bécyk », prête à commencer ce concert de la meilleure des façons. La moto est entrée dans le garage et Arcand est montée sur scène pour faire shaker les valeureux festivaliers rassemblés dans l’enceinte du garage.
C’est ainsi que le quintette de Québec a éveillé nos sens avec son opéra punk d’Avant la mort. Pour l’occasion Rox Arcand nous a même récité Le baiser de Judas et La communion des saints, rendant hommage du même coup à feu Lucien Francoeur, qui inspire grandement le projet du groupe. Entre tout ça, les chansons mouvementées ont retenti et la foule ne s’est pas fait prier pour se bouger la cage.

Etran de L’Aïr
La fin de ma deuxième journée festive s’est traduite par une découverte particulièrement fortuite. C’est avec « Les étoiles de L’Aïr » que j’ai eu la chance de veiller, au son de leur rock sablonneux, tout droit sorti des contrées désertiques du Niger. Les frères et cousins d’Agadez sont débarqués avec leurs chansons au élans riches et qui prennent leur temps, nous conviant généreusement dans leur univers mélodique.
La construction déstabilisante de leurs morceaux surprend initialement. Il faut préciser qu’après une heure, les musiciens n’avaient pris que trois ou quatre pauses. Mais quand on se laisse prendre par les motifs musicaux répétitifs, on a d’autre choix que de se déhancher abondamment, comme dans un sorte de transe inexplicable résultant de nombreux solos hypnotisants. Alors que les derniers rayons de soleil réchauffaient le village, Etran de l’Aïr a pris le relais et les virtuoses sont devenus ce que l’on préfère lors d’un festival comme celui-ci: une découverte dont nous nous souviendrons longtemps.
Crédit photo: Jay Kearney, Caroline Perron, Samuel Gaudreault