En ce jeudi soir assez maussade merci, votre scribe préféré était en service pour la première soirée du Taverne Tour. Cet événement organisé par Mothland — une respectée maison de disques doublée d’une agence de booking — est franchement apprécié par le mélomane avide de sensations sonores fortes… surtout en plein spleen hivernal !

Pour cette première soirée, c’était la jeune formation torontoise Gloin, le duo formé d’Eric Quach et de Michel Langevin (Voivod), nommé Thisquitearmy x Away, et les puissants Yoo Doo Right qui avaient la lourde tâche de dessuinter les oreilles du public, réuni en grand nombre au Ministère.

Gloin

L’automne dernier, le quatuor post-punk / noise rock nous avait présenté un premier album intitulé We Found This. On avait même eu l’occasion de les voir en concert dans le cadre du FME. Après un long drone synthétique, c’est le son de guitare de John Watson qui a capté notre attention en nous balançant le riff de Pitchfork, pièce introductive de l’album mentionné ci-dessus. Sur les planches du Cabaret de la Dernière Chance, il était difficile pour la formation d’adopter une présence scénique assumée. Sur la scène plus spacieuse du Ministère, c’est la bassiste Vic Byers qui s’est éclatée à fond au point où lors de l’avant-dernière chanson, elle a fait résonner sa basse couchée au sol. Malgré les quelques ralentissements rythmiques, Gloin a livré la marchandise. À ne pas manquer, si le quatuor passe près de chez vous !

Thisquietarmy X Away

Thisquietarmy est le nom de scène qu’emprunte le guitariste et compositeur montréalais Eric Quach. Ce féru d’expérimentations aime bien ajouter des influences métal, post-rock, krautrock et shoegaze à son bricolage sonore. En se joignant au batteur de Voivod, Michel Langevin, le travail de Quach prend maintenant tout son sens. De prime abord, quel plaisir de redécouvrir le jeu tribal et frénétique de Langevin dans des structures musicales plus libres que celles qui lui sont imposées, tout naturellement, avec Voivod. Les montées cathartiques, combinées aux quelques « blast beats », préparaient magnifiquement les subtils changements de mouvement qui caractérisent la musique du tandem. Un seul bémol. Malgré les bouchons d’oreilles qui atténuaient les décibels assénés par le duo, nous n’avons pas eu le choix d’entendre les quelques pies qui jacassaient sans cesse autour de nous. À la longue, on doit s’y faire, semble-t-il…

Yoo Doo Right

Ce trio hyper déflagrant nous avait présenté en 2021 une excellente entrée en matière : Don’t Think You Can Escape Your Purpose. Et l’année dernière, Yoo Doo Right confirmait hors de tout doute son immense talent, et sa pertinence, avec la sortie de l’excellent A Murmur, Boundless to the East.

Au FME, édition 2021, nous avions eu une bonne idée du son brutal que peut proférer la formation en concert. Pour vous donner une petite idée, le groupe faisait son test de son juste en face du Petit Théâtre de Rouyn-Noranda avant d’offrir un concert-surprise aux festivaliers présents… test de son qui s’apparentait à une secousse sismique.

Eh bien, c’est ce à quoi nous avons eu droit hier soir au Ministère. Un tremblement de terre ou une apocalypse sonore, appelez ça comme vous voulez ! Dès le départ avec Say Less, Do More jusqu’à la conclusive Face Together, Face Up, on the Front Lawn — pièce aux allures « swanniennes » qui ferme le deuxième album — les fondations de la salle spectacle ont tremblé littéralement !

Le contraste entre la basse vrombissante de Charles Masson et la caisse claire cristalline de John Talbot accentue dangereusement la puissance de la formation. La guitare de Justin Cober, elle, survole l’ensemble et élève, par moments, la musique du groupe vers le firmament.

Dans notre longue carrière de mélomane, nous avons rarement entendu un groupe aussi détonant. Évidemment, cette soirée s’est achevée dans un splendide vacarme qui a fait sourire l’auteur de ces lignes.

Notre première soirée du Taverne Tour ? Nous l’avons passée en plein cœur d’une éruption volcanique pour notre plus grand plaisir !