Critiques

VioleTT Pi

Manifeste contre la peur

  • L-A be
  • 2016
  • 40 minutes
7,5

Violett PiVioleTT Pi, c’est le projet de Karl Gagnon, musicien qui détonne dans le décor musical québécois avec son approche parfois nü metal, sa poésie psychédélique et son refus total des conventions. Il nous avait graciés du très intéressant Ev il y a trois ans. Après plusieurs tournées, quelques chansons qui ont attiré l’attention et même quelques rôles dans des webséries québécoises, le jeune homme nous revient avec Manifeste contre la peur.

On sent que Gagnon a mûri et ça lui va très bien. Manifeste contre la peur est toujours aussi éclaté que l’était Ev, mais son chaos est plus efficace, mieux tissé et surtout plus percutant. VioleTT Pi va plus loin, que ce soit en ajoutant une pause bruyante en plein milieu de La mémoire de l’eau ou encore avec des mélodies surprenantes, entre hip-hop et ambiance de cirque sur Opinel. Sur Manifeste contre la peur, Gagnon a utilisé sa plume colorée et poétique pour s’attaquer au plaisir dans la douleur. Ses personnages vivent des situations déchirantes, dichotomiques qui frôlent souvent avec le sadomasochisme.

Karl Gagnon possède un petit côté «fantôme de l’opéra». Et ce n’est pas le clavecin en ouverture qui apporte cette couleur, mais plutôt le ton qu’il adopte sur Héroïne. Cette dernière fait belle figure avec son instrumentation électronique et grasse qui rappelle l’époque Candy de la formation Orgy. On retrouve le même genre de sonorité sur Les huîtres de Julie Payette sur laquelle apparaît sa bonne amie Klô Pelgag.

Gagnon s’amuse à aller jouer dans des sujets moins grand public avec des chansons comme Bondage qui possède une mélodie très efficace. On l’entend aussi dans ses paroles avec des phrases comme: «Personne n’aime quand ça déchire, la peau des fesses des filles, même en prose de vierge péril» une chanson qui finit par nous raconter l’éveil du l’homosexualité d’une jeune fille qu’on imagine être pris dans les couloirs d’une école secondaire où sa sexualité ne serait pas facilement acceptée. Bref, Gagnon, n’hésite pas à plonger et parler de tout sans censure ou retenue.

Manifeste contre la peur est tout à fait réussi. Sa poésie pas piquée des vers est audacieuse et souvent magnifique. Musicalement, VioleTT Pi nous offre encore un mélange d’influence punk, nü metal et de chanson québécoise à la Jean Leloup. Ça vaut le détour.