Critiques

Jason Collett

Reckon

  • Arts & Crafts
  • 2012
  • 42 minutes
7,5

L’auteur-compositeur-interprète, résident permanent de Toronto, Jason Collett mettait au monde son quatrième album solo intitulé Reckon, qui fait suite à Rat A Tat Tat paru en 2010. Ce membre actif du collectif canadien Broken Social Scene crée un folk-rock alternatif orfévré, intelligible, animé par de somptueux arrangements et par des mélodies opérantes à souhait; et sur Reckon, le musicien poursuit dans la même veine.

Sauf que notre homme s’est trempé avec zèle dans l’actualité, puisqu’il s’est inspiré directement des évènements provoqués par le mouvement de contestation Occupy Toronto et des revendications justifiées qui en découlent. Donc, un album où les textes prennent un grande importance. Si le parti pris de Collett pour les sans voix est explicite, il ne tombe nullement dans la colère malsaine. Un peu comme le ferait un Springsteen ou encore un Dylan, le troubadour se met dans la peau des hommes et des femmes qu’il a côtoyé; comme un témoin vigilant et empathique à la cause des 99%.

Musicalement, Collett demeure dans un registre folk assez classique et traditionnel, mais compte tenu que le monsieur en connaît pas mal sur l’art d’écrire et composer des morceaux de qualité, ce Reckon touche encore une fois la cible. En ajoutant de somptueuses orchestrations de cordes, l’utilisation d’orgues Hammond et B3, des structures chansonnières parfois inventives et une interprétation juste et sentie de la part de Collett, vous avez devant vous une création folk de luxe.

Ce disque regorge de ritournelles bouleversantes et désarmantes. Rien à redire concernant les luxueuses cordes dans Pacific Blue et le changement de rythme inattendu dans Jasper John’s Flag. Rien à ajouter à cette tournure littéraire dans Ask No QuestionsCollett fait dire à un homme infidèle: «Ask no questions/And I tell you no lie». Que dire de plus s’appliquant à la ballade pianistique aux effluves de country-rock titrée Miss Canada, le folk dépouillé dans Talk Radio, l’atmosphérique et prenante Were Things Go Wrong, l’hommage paternel de My Daddy Was A Rock’N’Roller et la magistrale Don’t Let The Truth Get To You qui fait référence à ces financiers floueurs, qui, lorsqu’ils se retrouvent seuls aux prises avec des questionnements moraux, ont de la difficulté à trouver le sommeil… Du moins, j’ose espérer…

Décidément, voilà une offrande colorée par une rébellion mesurée qui se veut à la portée de tous et toutes et qui fait réfléchir sérieusement. Un message qui passe très bien au travers de ces simples et courtes chroniques exécutées par un compositeur de grand talent. Jason Collett est un songwriter qui mériterait qu’une plus forte proportion de mélomanes fasse sa connaissance. Les adeptes de Nick Drake, de Ryan Adams en format acoustique, de Dylan et Springsteen devraient prêter l’oreille attentivement à Jason Collett car ils pourraient tomber pernicieusement en amour avec lui!

Ma note : 7,5/10

Jason Collett
Reckon
Arts And Crafts
42 minutes

www.jasoncollettmusic.com/

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