Critiques

Jon Hopkins

Singularity

  • Domino Records
  • 2018
  • 62 minutes
7

 

Ça fait un bout que Jon Hopkins travaille dans le milieu de la musique; claviériste pour Imogen Heap, collaborateur sur des albums de Brian Eno et Coldplay, trames sonores de films et carrière solo développée lentement mais sûrement avec quatre albums, dont l’incroyable Immunity (2013). Une excellente dose d’ambiances, de mouvements organiques et de séquences dansantes qui gardaient les oreilles attentives durant l’entièreté de l’œuvre. Quatre ans (et d’autres projets) plus tard, Hopkins est de retour avec Singularity, un cinquième album qui devrait satisfaire bien des fidèles qui l’attendaient de pied ferme.

La pièce titre ouvre l’album de façon majestueuse, laissant d’abord la matière sonore prendre forme et augmenter en volume et densité. Une basse synthétique arpégée prend place, alourdie par le « kick », établissant ensemble une première partie lente qui finit par s’évaporer, pour ensuite laisser la place à un excellent segment IDM. Emerald Rush commence joliment avec un duo de piano réverbéré et de synthétiseur arpégé dans les aigus. Ça plane pendant un moment pour passer plus tard à une séquence rythmique très efficace, bien que peu originale, avec son effet de pompage daté. Neon Pattern Drum arrête le temps avec sa superposition de strates atmosphériques, bien rondes dans les basses et granuleuses dans les hautes. L’effet de « ducking » fantôme prend momentanément le dessus sur la mélodie, ponctuant celle-ci avec des silences étouffés plus ou moins réussis. Le « kick » vient sauver la partie, accompagné de variations dans les sons percussifs.

Everything Connected reprend exactement la forme de la pièce précédente, mais coupe rapidement le lien pour permettre à un « lead synth » de jouer sur chaque temps, répétant la mélodie jusqu’à ce que la basse « acid » et les percussions reprennent le flambeau. La pièce s’arrête une deuxième fois, sans la trame de fond, et s’estompe finalement après dix minutes de jeu. Feel First Life commence tout doucement, en filaments de notes. Le piano résonne dans toute sa beauté et crée une pause contemplative bien appréciée. Ça se développe en ambiance cinématographique éclairée par un chœur d’église faisant vibrer les harmoniques de façon merveilleuse. C O S M conserve l’onde placée dans les hautes fréquences, un synthé percussif agence très progressivement les accords en une masse sonore aérienne planante. La basse oscillante et le rythme solidifient la mélodie pendant un moment, sans pour autant aller plus loin, laissant la pièce se terminer en s’éloignant lentement.

Le piano revient sur Echo Dissolve, sous la même forme intimiste, prenant le temps de développer une petite mélodie comme un interlude relaxant. Luminous Beings commence de façon expérimentale, faisant plonger une onde dans les basses de sorte que chaque oscillation fasse une vague sur les autres éléments. Le « kick » et le charleston saturé ramènent la forme dansante, en se rapprochant davantage du techno et en répétant la même boucle pendant douze minutes. Heureusement, le jeu de densité et de combinaison d’éléments renouvelle ladite boucle à quelques reprises, mais pas suffisamment pour masquer le niveau indécent de répétitions. Recovery conclut joliment l’album au piano sur une mélodie tout aussi sensible que les deux autres pièces, jouant sur une forme rythmique à deux notes.

Pour un album très attendu et des attentes plus ou moins raisonnables, Singularity passe facilement le test des premières écoutes, réassurant l’amateur fidèle avec sa qualité de production et sa palette sonore très texturée. Ce qui est moins satisfaisant par contre est le déséquilibre entre les trois pièces au piano, très douces et sensibles, et les six pièces électroniques dansantes, souvent saturées d’effets de pompage assourdissants et de répétitions en boucle. L’expérience auditive fait penser à une collaboration entre Chilly Gonzales et Digitalism, ce qui est très bien en soi, mais ne permet pas de sortir tout à fait de l’ombre de Immunity.

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