Critiques

Charlotte Gainsbourg

Rest

  • Because Music
  • 2017
  • 46 minutes
9
Le meilleur de lca

Le nouvel opus de la fille chérie de la musique française nous propose un album qui contraste avec le reste de sa carrière. Elle nous a habituée lors de ses derniers albums à des collaborations réussies, entre autres avec Beck sur l’excellent IRM – ce dernier album ne fait pas exception. Elle fait appel cette fois à SebastiAn, connu pour ses remixes électros et son travail avec Philippe Katherine. À mi-chemin entre Histoire de Mélodie Nelson du paternel et les meilleurs albums d’Air, le métissage de styles se fait avec aisance. Métissage qui s’impose avec de nombreuses collaborations, dont Paul McCartney et Guy de Homem-Christo de Daft Punk.

Frappée du suicide de sa demie sœur, Charlotte Gainsbourg nous fait vivre son deuil par des airs mélancoliques. L’introduction (Ring-a-Ring O’Roses), bien ficelée, nous impose immédiatement une ambiance intime et glauque qui charme. Et soudain, après un couplet hypnotique en français souffle un refrain en anglais qui nous berce tout doucement, un pari qui rapporte. Les arrangements puissants viennent appuyer des beats électroniques intenses, voire farouches. Malgré ces arrangements chargés, sa voix angélique, qu’elle a héritée de sa mère Jane Birkin, amène une douceur qui nous permet de digérer le tout sans effort.

La quatrième chanson, Deadly Valentine, me rappelle les merveilleuses mélodies de Moon Safari du groupe d’électro français Air et les rythmes hypnotiques de Beck, deux de ses anciens collaborateurs. C’est toutefois la chanson titre qui est la plus saisissante. La composition de Homem-Christo, agencée aux paroles éthérées de Gainsbourg, nous fait ressentir la détresse qu’elle a vécue lors de la dernière année. Kate nous perce le cœur couplet après couplet : « Nous devions vivre ensemble dans un monde imparfait » susurre-t-elle par-dessus une orchestration funeste, mais grandiose. Elle refait le coup avec la chanson-titre où les paroles lourdes de sens ne laissent personne insensible :

Prends-moi la main, s’il te plaît
Ne me laisse pas m’envoler
Reste avec moi, s’il te plaît
Ne me laisse pas t’oublier
Rest

Les trois dernières chansons donnent l’envie d’écouter le tout du début. Dans vos airs, avec sa mélodie simpliste, nous apporte l’intimité qui manque parfois en plus de charmer les admirateurs de ses premiers albums. Les crocodiles révèle le génie de la collaboration avec SebastiAn. Le contraste entre la pulsation électronique omniprésente et les violons subtils méritent plusieurs écoutes, c’est l’une des plus réussies. En clôture, Les Ovalis, est un délire disco qui nous transporte complètement ailleurs et ce, tout en sensualité.

Dur d’imaginer qu’un album de Charlotte Gainsbourg serait plus réussi qu’IRM en 2009, mais Rest le surpasse avec brio. Il est à la fois touchant et exalté, paisible et bruyant, doux et dur; du bilinguisme musical. Ce maelstrom d’émotions nous permet de percevoir l’état psychologique dans lequel elle se trouve après les drames récents dans sa vie personnelle. Elle confirme sa place parmi les grandes de la musique française, voir de la musique tout court.

Ma note: 9/10

Charlotte Gainsbourg
Rest
Because Music
46 minutes

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