Critiques

Vald

Pandémonium

  • Echelon Records
  • 2025
  • 56 minutes
6,5

J’ai une relation trouble avec Vald, surtout depuis ces dernières années. Avec la sortie de son dernier album V et de sa réédition VV5, j’étais prête à accrocher mes crampons et à renoncer à mon statut de fan, statut que j’avais chéri pendant longtemps, et ce à mon grand dam. Pourtant, Vald est un acteur majeur de la génération « depuis 2015 » du rap français. Avec des thèmes uniques, tout droit sortis d’un journal intime d’un lycéen mal dans sa peau, Valentin Le Du a réussi à amasser un auditoire considérable et dévoué. On peut débattre leur longévité et s’ils ont bien vieilli ou non, mais des albums comme Agartha et XEU ont été des albums importants pendant les années 2015-2019 de ce bon vieux rap français. Et oui, même si plusieurs ne seront pas d’accord avec moi, je trouve que Ce monde est Cruel est un très bon album.

Mais donc, comme mentionné plus tôt, ces dernières années n’ont pas été les plus reluisantes. Qu’à cela ne tienne, Pandémonium est à présent à nos portes. Est-ce que Vald sera capable de recapturer la magie de ses premiers opus tout en présentant une nouvelle facette de lui-même?

De manière générale, Pandémonium est un bien meilleur effort que V. On y ressent plus de vitalité et de créativité. Dans un cocktail alliant nostalgie et maturité, Vald œuvre ce qu’il a en lui pour assembler un projet qui le représenterait vraiment. Malgré cette progression, je me retrouve quand même face à un album en demi-teinte, entre nostalgie, rétroaction et redites de l’époque, qui ne sont peut-être plus autant d’actualité qu’aujourd’hui. QUE DES PROBLÈMES, au-delà de réutiliser le flow classique de Vald, reprend des thèmes qu’on croyait avoir déjà bouclés à l’époque de XEU. FLPVCOF, morceau le plus sulfureux de l’album, évoque le BDSM et la relation du rappeur avec le site OnlyFans (c’est sans équivoque). UFOV semble être un morceau technique axé sur les allitérations et les juxtapositions de l’alphabet. Bref, il y a des idées, mais celles-ci demeurent parfois superficielles. Cette façon juvénile d’aborder ces thèmes aurait pu m’intéresser à un plus jeune âge, mais aujourd’hui, à 23 ans, je ne sais pas si un morceau énumérant ce qu’on peut trouver sur le darknet de manière purement superficielle peut vraiment m’intéresser (le morceau s’appelle littéralement DARKNET).

Et pourtant, il y a des étincelles dans Pandémonium, et elles éclosent là où Vald ose prendre le plus de risques. Je pense à SUPERMAN, petite ritournelle sur fond de rythmique jersey qui, étonnement, marche très bien. J’aurais bien vu Green Montana sur un rythme comme celui-là. Mais la vraie surprise du disque réside dans le morceau PROZACZOPIXAN. Ici, on est en plein dans du bouyon, style musical d’origine dominicaine. Entre ce morceau et KONGOLESE SOUS BBL, autre morceau bouyon ayant connu son succès viral en France ces derniers mois (merci Theodora), je ne peux qu’être ravie.

Mais tout n’est pas ironique et dérisoire. Ayant perdu sa mère dernièrement, l’artiste doit également vivre avec un deuil difficile à faire, et le dernier tiers de l’album témoigne de cette tristesse profonde. Le flow monotone et réservé de 93 MILLIARDS, par exemple, marche merveilleusement bien, couplé avec un refrain empli de spleen (sans parler de la section de Suikon Blaz Ad, excellent rappeur membre de l’entourage de Vald). LES ÉCHAPPÉS se laisse aller avec une prod mélancolique et nostalgique qui fait du bien. On sent une évolution marquée chez Vald, un air de maturité qui lui va comme un gant. Finalement, PARADIS PERDU se démarque par sa structure unique : le morceau est majoritairement composé de « punchlines » de sa propre mère, rendant ainsi hommage à l’humaine qui a façonné Vald. Au niveau de la forme, c’est un morceau qui peut laisser sur le carreau, mais l’idée est touchante et force le respect.

Au final, et c’est ce qui est malheureux, PANDÉMONIUM n’est pas 100% fidèle à son titre. L’album débute pourtant très fortement, avec des morceaux comme RÉGULATION et LÉTHARGIE. Pourtant, je reconnais une vulnérabilité et une tristesse comme on en voit rarement chez Vald. Je vois également une pointe de sérénité et d’espoir, une invitation à accueillir la vie et ses nouveaux aléas. Car oui, la vie dans sa forme la plus brute est un pandémonium en soi.

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