Critiques

TV Priest

My Other People

  • Sub Pop Records
  • 2022
  • 41 minutes
6,5

Formé en 2019 à Londres, TV Priest a signé rapidement avec la mythique maison de disques états-unienne Sub Pop. En fait, ils ont signé cette entente tellement promptement que leur premier long format, Uppers, a été lancé au mois de février 2021 à peine quelques mois après cette signature. Un disque qui est passé sous pas mal de radars en Amérique du Nord et qui aurait mérité une plus grande attention médiatique de ce côté-ci de la grande flaque. Sans que ce soit un grand disque, tant s’en faut, cette mixture de post-punk à la The Fall, de punk rock pur et dur et d’indie rock façon The National/Interpol, entendue sur Uppers, avait le mérite d’être efficace et sentie.

Après les promesses formulées par cette première offrande, les Londoniens étaient attendus de pied ferme par tous ceux qui suivent la déferlante post-punk qui sévit depuis quelques années au Royaume-Uni. Est-ce que TV Priest allait être en mesure de se différencier significativement de ses semblables ? Est-ce que Charlie Drinkwater allait emprunter une nouvelle avenue vocale, prenant ses distances des approches de Joe Casey (Protomartyr), Nick Cave et Matt Berninger (The National) ?

Rien de tout cela ne survient sur ce nouvel album intitulé My Other People. Or, Drinkwater, Nic Beuth (basse et claviers), Alex Sporgis (guitare) et Ed Kelland (batterie) misent encore une fois sur l’efficacité chansonnière sans trop s’aliéner ceux qui les affectionnent en mode dissonant et abrasif, même si l’atmosphère générale de ce deuxième album est nettement plus « contenue ».

My Other People est un disque subtilement tendu — trop contracté, peut-être ? —  oscillant entre l’anxiété provoquée par les incessantes incertitudes de l’existence et l’urgence de vivre le moment présent à sa pleine capacité. Dans la pièce-titre, portant sur une possible rupture amoureuse, cette crispation est palpable et magnifiquement exprimée par Drinkwater, un parolier hautement habile, s’il en est un :

We had a love devout without a shred of doubt
We never worried ’bout other people
You broke the spell and wanted something else
Well, now go fuck yourself with other people

– My Other People

Musicalement, après seulement deux disques, on décèle aussi une impasse créative qui pointe déjà à l’horizon. Compte tenu du florilège de formations du même acabit qui pullulent depuis plusieurs années, TV Priest ne s’éloigne pas assez de la formule habituelle du post-punk pour se différencier de ses semblables. En fait, l’adoucissement de certaines chansons comme Limehouse Cut — que n’aurait pas reniée The National — et The Happiest Place On Earth laisse entrevoir un léger manque d’inspiration.

À la défense du groupe, TV Priest n’a pas pu tourner à sa guise au cours des deux dernières années n’ayant donné qu’un seul concert dans un entrepôt londonien avant l’avènement de la pandémie de COVID-19. Par la suite, Uppers a été lancé et… My Other People vient de paraître. Donc, la formation fut dans l’impossibilité de tester ses nouvelles chansons devant public. Donnons la chance au coureur, mais les Britanniques devront se mettre un peu plus en danger lors de la prochaine parution.

Sans quoi, on pourrait se lasser de TV Priest.

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