Critiques

Turnstile

GLOW ON

  • Roadrunner Records
  • 2021
  • 35 minutes
6,5

Il y a des albums qui déroutent dès les écoutes initiales… et qui déstabilisent toujours autant après plusieurs auditions. Depuis 2015, avec la parution de Nonstop Feeling, la formation de « crossover punk hardcore », Turnstile, s’évertue à ériger des ponts entre les purs et durs du genre et un public plus docile. En 2018, l’excellent Time & Space confirmait l’ascension de la formation originaire de Baltimore, Maryland.

Le charismatique chanteur Brendan Yates, le batteur-percussionniste Daniel Fang, les deux « riffers » que sont Brady Ebert et Pat McCrory et le bassiste Franz Lyons sont de retour avec un nouvel album judicieusement intitulé GLOW ON. Réalisé par Mike Elizando (Twenty-One Pilots, Eminem), ce nouveau long format carbure à l’énergie positive et ce n’est pas étranger à l’apport synthétique accentué que l’on y entend (boîtes à rythmes, claviers scintillants, etc.). La réalisation lustrée d’Elizando vient bien sûr amoindrir légèrement la force de frappe habituelle du groupe, du moins celle obtenue sur Time & Space.

Toutes les chansons de GLOW ON sont donc des hymnes. De l’entrée en matière, intitulée MYSTERY, jusqu’à la conclusive LONELY DEZIRES, le quintette nous propose… du hardcore d’aréna, rien de moins ! Et c’est ce qui désoriente l’auteur de ces lignes. Or, cette direction assumée permettra sans aucun doute au groupe d’élargir son bassin d’admirateurs.

En fait, Turnstile plonge plus profondément dans le rock alternatif des années 90 que sur ses disques précédents tout en conservant juste assez de hargne pour ne pas faire fuir le fan de la première heure. Disons-le sans détour, sur GLOW ON, le groupe ne s’égare pas dans des concepts ampoulés, tant s’en faut. Il ne cherche qu’à divertir, à rassembler et il le fait très bien. L’éclectisme des arrangements procure un certain raffinement à des chansons qui, sans cette diversité instrumentale, auraient paru linéaires, car les riffs de McCrory et Ebert sont somme toute assez convenus.

La performance vocale sentie de Yates et la prestation de Daniel Fang permettent à ce GLOW ON de s’en tirer avec les honneurs. Le jeu métronomique de Fang, entre autres, rehausse grandement l’efficacité des guitares et les nombreuses contributions percussives sont juste assez inventives (cloche à vache, bloc de bois, etc.) pour amoindrir le penchant satiné de la réalisation.

Encore une fois, GLOW ON renferme sa large part de chansons-matraques. L’introduction punk dans DON’T PLAY est réussie. HOLIDAY a tout ce qu’il faut pour faire hurler de plaisir, un de ces jours, le festivalier en manque de sensation forte. UNDERWATER BOI nous escorte vers l’indie-rock jusqu’à l’apparition du traditionnel riff qui tue. Le seul moment où notre musculature se décontracte ? ALIEN LOVE CALL, une pièce aérienne interprétée en compagnie de Devonté Hynes, alias Blood Orange.

Après avoir lu les innombrables critiques élogieuses, épousant l’hypothèse que Turnstile repousse « les limites du genre », on ne souscrit qu’à moitié à cet enthousiasme délirant. Ce que certains qualifient comme étant une réelle réinvention du punk hardcore machin-chouette, on perçoit plutôt ce disque comme un simple virage pop qui permettra à la formation de remplir, un jour, des salles de plus en plus vastes.

Or, il n’y a pas à bouder son plaisir. GLOW ON est un album original, un brin imprévisible et qui contient suffisamment de lourdeur pour être crédible.

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