Critiques

The Chats

Get Fucked

  • Bargain Bin Records
  • 2022
  • 28 minutes
8
Le meilleur de lca

Formé en 2016, le désormais trio punk rock australien The Chats — le guitariste Josh Price a quitté la formation l’année dernière — obtient une reconnaissance de plus en plus accentuée. Qualifié de « shed rock » par les fans australiens, le groupe est souvent comparé à des compatriotes comme King Gizzard and the Lizard Wizard et Eddy Current Suppression Ring. Votre humble scribe, lui, y entend une mixture d’Amyl and the Sniffers, The Hives et Chubby and the Gang en plus d’un je-ne-sais-quoi remémorant le Ty Segall de l’album Twins.

C’est en 2020 que Josh Hardy (guitare), Matt Boggis (batterie) et Eamon Sandwith (basse et voix) élargissaient leur rayonnement avec la parution de High Risk Behaviour; un excellent album présenté dans un enrobage encore lo-fi. The Chats nous présentait récemment son troisième album en carrière intitulé Get Fucked.

Comme tout bon album punk qui se respecte, Get Fucked est un sympathique doigt d’honneur destiné à tous les responsables de ce gâchis social, politique et environnemental qui point à l’horizon. En fait, ce long format est la bande-son d’une bombe à retardement; celle d’une société où les injustices économiques sont grandissantes et constamment balayées sous le tapis. Cette approche littéraire frontale nous permet de bien saisir en quoi la pauvreté est une tare qui exclut et génère une profonde colère dans une société qui n’en a que pour la performance, la célébrité et l’appât du gain.

Une pièce comme Paid Late raconte l’histoire d’un paumé incapable de retirer un seul sou dans un guichet automatique bancaire, lui qui souhaitait engloutir son malheur dans quelques rasades d’alcool…

Starin’ at the ATM

It says insufficient funds

That’s not just good enough

Cause right now I wanna get drunk

– Paid Late

Dans Ticket Inspector, Eamon Sandwith, avec sa voix nasillarde et rageuse, personnifie un inspecteur de billets qui prend un malin plaisir à prendre en flagrant délit tous ces utilisateurs clandestins, eux aussi sans le sou, qui tentent simplement de prendre un train :

Spent all day patrollin’ the station
Only form of contact is intimidation
Wound up, violent on occasion
But I’m just fightin’ against fare evasion

– Ticket Inspector

Évidemment, ces propos sont appuyés par un groupe soudé au quart de tour grâce aux innombrables concerts donnés par le groupe après la sortie de High Risk Behaviour. Même si Get Fucked est nettement mieux réalisé que tous ces prédécesseurs, le son des Chats demeure toujours aussi grinçant. Certains admirateurs de la première heure pourraient y percevoir un déficit de naïveté, mais en ce qui nous concerne, la formation garde intacte toute sa pertinence.

Du début à la fin de ce long format, Sandwith et ses compères frappent sur le même clou avec un jouissif sarcasme. The Price Of Smokes met en lumière ce moment d’angoisse inflationniste que nous vivons à l’heure actuelle. 6L GTR est une charge garage rock contre tous ces conducteurs de voiture sport qui bafouent les règles de conduite routière. Le tonifiant solo de guitare en conclusion de Panic Attack vient bonifier ce refrain asséné avec une répétitivité belliqueuse par Sandwith. Struck By Ligthning est, pour sa part, une mixture réussie du punk hardcore états-unien des années 80 et celui proposé par les Britanniques au beau milieu des années 70.

Simplement, The Chats est un groupe punk haletant qui donne envie de s’enfiler de nombreuses bières avec quelques amis dans une soirée bien arrosée afin d’échapper à la morosité ambiante.

L’une des excellentes formations punks du moment.