Critiques

Spoon

Lucifer on the Sofa

  • Matador Records
  • 2022
  • 38 minutes
7

Britt Daniels est sans contredit l’un des auteurs-compositeurs états-uniens parmi les plus doués de sa génération. C’est au sein de la formation Spoon qu’il a peaufiné son art dans un relatif anonymat jusqu’à la parution de l’excellent Ga Ga Ga Ga Ga en 2007. Ce long format a positionné le groupe parmi les principales attractions de l’indie rock américain de l’époque. Le quintette déployait alors un rock atypique qui mettait l’accent sur des riffs de guitares désarticulées, mais aussi sur une section rythmique en mode contretemps. Même si le groupe demeurait accessible, il réussissait à plaire à un public plus exigeant grâce à son originalité rythmique. Les choses ont commencé à changer avec la parution de They Want My Soul (2014); un virage synthétique qui fut confirmé avec la sortie de Hot Thoughts (2017).

En 2019, Daniels, qui résidait depuis plusieurs années à Los Angeles, a déménagé ses pénates dans son patelin d’origine, Austin, Texas, avec la ferme intention de « casser » le son des derniers albums de Spoon. C’est donc dans cet état d’esprit que les chansons de ce nouvel opus, intitulé Lucifer On The Sofa, ont pris forme. Dans le communiqué de presse remis par la maison de disques Matador Records, Daniels explique avec simplicité ce qui l’a inspiré pour cette nouvelle aventure créative : « Je voulais un son de rock classique pour un gars qui n’a jamais compris Eric Clapton ».

Aidé par Mark Rankin (Adele, Queens of the Stone Age), Dave Fridmann (The Flaming Lips) et Justin Raisen (Angel Olsen, Kim Gordon), le groupe a commencé l’enregistrement en 2020 pour le stopper en octobre dernier seulement, pandémie oblige. Et c’est un retour prévisible au rock auquel on assiste. Mais ceux qui avaient apprécié le rock tortueux et abrasif proféré sur l’album Transference (2010) pourraient demeurer sur leur appétit.

En effet, les guitares sont nettement plus présentes que sur les deux derniers efforts de la formation, mais elles demeurent bien propres. Après un départ canon avec quatre pièces assez grinçantes et accrocheuses, dont l’excellente reprise de la pièce Held — chanson écrite par Bill Callahan lorsqu’il oeuvrait avec Smog — Spoon ralentit la cadence… pour ne jamais atteindre les standards établis avec The Hardest Cut, The Devil & Mister Jones et Wild. Il y a bien Feels Alright et On The Radio (du Spoon pur jus) qui brassent un peu la cage, mais l’énergie s’étiole jusqu’à la conclusion de ce disque qui semblait pourtant prometteur.

Malgré la présence sentie du Wurlitzer, Astral Jacket est une ballade assez linéaire. Satellite remémore Elton John et la conclusive pièce-titre, inspirée par une promenade nocturne de Daniels durant le confinement pandémique, est quelconque.

Néanmoins, Spoon est incapable de médiocrité. Un peu trop domestiqué pour plaire pleinement à l’auteur de ces lignes, Lucifer on the Sofa est quand même un disque de pop-rock satisfaisant. Britt Daniels sait écrire de très bonnes chansons, mais ce qui singularisait la formation a disparu.

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