Critiques

Souldia

L’album noir

  • Explicit Productions
  • 2018
  • 32 minutes
7,5

Alias Kevin Saint-Laurent, Souldia n’a pas lambiné. Cette productivité est représentative des dernières années: depuis trois ans, il a sorti six albums tant en groupe qu’en duo ou solo, dont le remarqué Krime Grave (2014). À peine un mois et demi après son dernier disque intitulé Survivant, Souldia sort un autre album intitulé L’album noir. Contrairement aux autres albums parus récemment, il n’y a aucune collaboration hormis la coproduction par Farfadet. Souldia a tout fait par lui-même, ce qui renforce le côté très brut du disque. La production est très efficace: bons beats et effets assez léchés (on salue l’utilisation modérée d’autotune) laissent toute la place à la rage des paroles. Il n’y a aucun compromis sur le ton, qui parle allègrement de son passé dans la rue.

Lors de la parution de Survivant, Kevin Saint-Laurent expliquait dans diverses entrevues qu’il voulait y représenter la moitié de vie de lumière qu’il vit depuis sa sortie de prison en 2011. Il avait purgé 21 mois pour possession d’une arme prohibée et depuis il tente avec succès de rester sur la voie de la musique uniquement. L’album symbolisait la chance qu’il avait d’être encore là et de rapper.

Dans L’album noir, on n’est pas du tout dans le même état d’esprit. C’est comme si cet album était la soupape pour rappeler que sa moitié reste liée à la rue et au crime, peu importe sa nouvelle vie. Il le dit d’ailleurs dans la chanson qui ouvre le disque, Les préliminaires : «j’ai quitté la rue mais j’ai toujours un pied dedans». Black Album, Astronaute et SKOL sont aussi dans cette même teneur avec des mentions respectivement de prostitution, de gangs de rue et d’évasion de prison.

L’album noir n’est pas que sombre malgré son titre. Même si le ton est dur, il y a des bouts qui ne sont pas dénués d’humour. Ventriloque en est un. La chanson regorge de clins d’œil au hip-hop québécois, du coup d’éclat du 83 à l’ADISQ en passant par Alaclair Ensemble qui s’était fait traiter de « Passe-Partout sur l’acide » par l’animateur de radio Dominic Maurais. Souldia l’imagine d’ailleurs fumer un joint avec le groupe, ce qui est quand même très drôle. Aussi, malgré le texte qui parle d’évasion de prison, on ne peut s’empêcher de sourire avec le « C’tait pas ça que c’tait » d’Alaclair cité dans SKOL.

En somme, L’album noir est très satisfaisant. Oui, il y a des bouts dérangeants sur plusieurs morceaux, mais il y a des lignes percutantes et l’album est si bien produit que ça sauve la mise. Ça mérite l’écoute. Cet album rappelle le côté moins pop du hip-hop qui est moins mis en avant dans les médias dits mainstream. Pour un rap en santé, il faut que des esprits plus crus à la Souldia existent aussi et soient mis en lumière. Il est plus aisé de le faire lorsque ce sont des albums de qualité.

 

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