Critiques

Son Lux

Brighter Wounds

  • City Slang Records
  • 2018
  • 45 minutes
6

Son Lux nous dévoile aujourd’hui le dernier album de leur discographie, Brighter Wounds, successeur à l’éclectique Bones, disque sorti il y a trois ans. Éclectique comme les trois albums le précédant, d’ailleurs. Ryan Lott, le fondateur et producteur du groupe, fait de cette étonnante variété stylistique sa marque de commerce, alternant en l’espace de quelques secondes entre d’immenses refrains et de subtils couplets, entre l’orchestre symphonique et le quatuor à cordes, le tout en tentant d’explorer l’espace contenu dans cette multiplicité. Et au centre de tout ça, il y a Son Lux qui, malgré la production admirable de Lott, ne réussit malheureusement pas tout le temps à trouver un équilibre viable entre ses différentes idées ou du moins, une forme pouvant toutes les englober.

Hélas, Brighter Wounds ne se réconcilie pas avec ces indécisions stylistiques. Pas que d’avoir une telle variété soit négatif, au contraire; je pense immédiatement à Clarence Clarity en termes de compositions très composites. Chez lui, cependant, le tout prend son sens dans la forme le plus souvent et l’évolution de No Now à une échelle méso et macroscopique est constructive, pleine de sens. Chez Son Lux, si ce n’était pas de la production lissée et perfectionniste, on aurait l’impression que des idées nous sont garrochées sans développement réel. La plupart des pièces ont deux ou trois idées centrales qui se succèdent sans s’influencer, sans se toucher presque. C’est fâcheux, car plusieurs sont intéressantes, au niveau mélodique, harmonique ou sonore, mais la masse qu’elles constituent est informe.

Et ce n’est pas tout ce qui me dérange dans cet album… Hélas no. 2 : on reconnaissait au groupe une certaine variété à l’échelle d’un album, une disposition en montagne russe des œuvres dans leur tout. Croyez-le ou non, Brighter Wounds fait encore banqueroute ici. Bien que ce puisse être une bonne chose chez certains artistes, leur nouvel œuvre est très monolithique, dans la mesure où rien ne semble ressortir du lot au cours des trois quarts d’heure où elle s’étend. La majorité des pièces sont toutes peintes d’une même couleur; couleur qui s’affadit même quelque peu à force d’écoute.

Il m’est pénible d’être aussi critique avec le travail de ce groupe, que j’admire pourtant beaucoup pour leur créativité générale. Je parle à quelques reprises de la production; l’inventivité des procédés que Lott utilise est rafraîchissante à mon sens, et c’est une constante dans tous les albums du groupe. Mon exemple préféré dans cet album : les masses de saxophones et de clarinettes auxquelles il a appliqué une gate en sidechain avec la voix à la fin de Dream State. C’est le genre de trucs simples, mais dégourdis qui donnent un regain d’intérêt à la musique. Là où je crois que ça dérape un peu, c’est justement que le producteur semble porter davantage d’attention à la production qu’à la musique qui la précède. Je ne dis pas non plus qu’il ne compose pas bien. Dream State, justement, est très intéressante en ce sens qu’elle reprend des codes propres à une pop normalement hautement insipide (à la Imagine Dragons, mettons) pour les appliquer au style beaucoup plus expérimental de Son Lux. C’est une façon de faire que j’admire beaucoup, mais qui requiert un savoir-faire compositionnel que le groupe ne semble manifestement pas avoir acquis à ce jour. Néanmoins, je garde espoir !

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