Critiques

Slipknot

We Are Not Your Kind

  • Roadrunner Records
  • 2019
  • 63 minutes
7,5

Jadis sauveurs du métal dans ma jeune tête de gamin troublé, les gars de Slipknot étaient très importants pour moi. Surtout depuis que Korn avait vendu son âme au diable et viré Ross Robinson, grand prêtre de la production Nü-Metal. Ce dernier travaillait d’ailleurs désormais avec les merveilles masquées. Ils ont utilisé ses services pour leurs albums Slipknot (1999) et Iowa (2001).

Mais scandale et trahison! Ils ont fait exactement la même chose que Korn rendu à leur 3e album (Vol.3. The Subliminal Verses), paru en 2004. C’est aussi à ce moment-là que j’ai commencé à perdre intérêt pour le groupe, étant désormais versé dans les trucs plus corsés grâce à Converge et Isis, notamment.

Reste que depuis ce temps-là, c’est quand même toujours très difficile de ne pas porter attention au groupe, qui a mangé son lot de chnoute avec la drogue, les conflits d’ego, la mort de leur bassiste et co-fondateur Paul Grey en 2010, ainsi qu’avec le départ du batteur Joey Jordison, quelque temps plus tard. Les albums 4 et 5 reflètent ces périodes troubles et sont plutôt inégaux.

Après un buzz qui aura duré près d’un an, la bête à neuf têtes persiste et signe enfin son disque le plus solide depuis Iowa. Si la première chanson (Unsainted) faisant suite à l’intro de style John Carpenter me rebute encore en raison de son refrain archi-pop chanté avec une chorale, je dois admettre que les couplets sont très solides, surtout au niveau vocal. À 45 ans, Corey Taylor est plus versatile et puissant que jamais. C’est lui la véritable vedette du groupe, n’en déplaise au jeune Jay Weinberg, qui pulvérise les fûts avec une habileté déconcertante.

La suite des choses est beaucoup mieux que la première chanson et la seconde pièce offerte se classe très haut dans le palmarès des meilleurs morceaux de l’album. Birth of the Cruel est un heureux mélange entre l’agression tordue des premiers jours et un chant clean qui rappelle un peu Layne Staley d’Alice in Chains, influence assez lourde dans le panthéon personnel de Taylor. Un autre interlude un brin inutile précède Nero Forte au sein de laquelle Corey ressort ses skills de rappeur agressif des premiers jours pour un résultat fort intéressant. Je ne me rappelle pas la dernière fois que j’ai eu autant de plaisir à écouter trois chansons de Slipknot d’affilée, sérieux.

La suite du disque est un peu en dent-de-scie, mais somme toute, il y a des trucs intéressants à tirer d’à peu près toutes les chansons. Un petit côté Bowie ressort de A Liar’s Funeral, une signature de temps très louche fait en sorte que Spiders ne peut pas être une ballade de Stone Sour (l’autre groupe de Taylor, très nickelbackesque) et My Pain est un OVNI intégral dans la discographie du groupe de Desmoines, Iowa. Du côté des trucs plus musclés, Orphan, Red Flag et Critical Darling sont toutes assez bien foutues.

Mais on va se dire les vraies affaires : le clou du spectacle, c’est Solway Firth. C’est la pièce qui sert de conclusion à l’album et c’est également la plus intense, de loin. Tout l’album est inspiré par la fin de la relation toxique entre Corey Taylor et son ex-femme, mais c’est dans cette pièce-là qu’il se défoule le plus. Il a vaincu cette rude épreuve en étant sobre et hurler dans un micro a certainement été une excellente thérapie. On a presque le goût de remercier son ex pour la performance dévastatrice du chanteur tout au long des 6 minutes et demie de cet ultime assaut. Je n’ai pas écouté une chanson de Slipknot autant que celle-là depuis 2001.

Somme toute, We Are Not Your Kind est un très bon disque de métal grand public. Si tu me donnes le choix entre ça et tous les disques de Metallica depuis 1987, je choisis Slipknot haut la main. Ils méritent certainement leur place au sommet pis ils sont pas mal plus amusants à regarder aussi, qu’on se le dise!

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