Critiques

Wave, Patrick Watson

Patrick Watson

Wave

  • Secret City Records
  • 2019
  • 38 minutes
8,5
Le meilleur de lca

Pour beaucoup de gens comme moi, qui ont évolué avec la scène indie montréalaise, écouter un nouvel album de Patrick Watson, c’est un peu comme rentrer à la maison. Son deuxième album, Close To Paradise, est sorti en 2006, alors qu’Arcade Fire, We Are Wolves, Wolf Parade, Karkwa, Malajube et tant d’autres atteignaient des sommets créatifs. Mélangeant des caractéristiques communes à plusieurs de ces groupes — usage d’instruments d’orchestre, expérimentations sonores, mélodies accrocheuses — Patrick Watson s’est rapidement imposé comme un artiste emblématique de la métropole.

Lorsqu’on lance Wave, le dernier opus du chanteur montréalais, on se retrouve d’emblée en territoire connu. Le rythme simple, mais bien affirmé du premier morceau de l’album soutient un enchaînement d’accords de piano nimbé d’écho, suivi plus loin d’envolées de violons. La voix caressante de Patrick Watson s’installe rapidement, mais on sent quelque chose de différent. La légèreté n’est plus la même. Les paroles nous le confirment – « I never thought / I’ll have to start again », si la maison reste aussi belle, il y a trouble en la demeure.

L’œuvre de Patrick Watson a mis de l’avant jusqu’ici un univers planant, empreint de rêveries et d’histoires fantastiques. Certes, son dernier album Love Songs For Robots, paru en 2015, transportait déjà l’auditeur sur des chemins plus tortueux, inspirés par la science-fiction. Sur Waves, cette théâtralité cède un peu la place à la réalité.

Une réalité torturée, au cours des quatre dernières années, par le décès de la mère de Patrick Watson, puis par la séparation d’avec sa compagne. De plus, Robbie Kuster, le batteur l’accompagnant depuis ses débuts, a quitté le groupe. Cette période trouble imprègne ainsi Wave, amenant le chanteur à signer son album le plus personnel jusqu’ici.

Ainsi, dès le second morceau, la chanson titre de l’album, l’atmosphère se fait plus lourde. D’une immense tristesse, la pièce prend la forme d’un long crescendo. Mais le deuil évoqué par les paroles semble trouver sa résolution dans la finale, après un changement de rythme inattendu, tandis que la batterie vient briser la vague construite jusque là dans le morceau, avant de se retirer et de laisser le pedal steel de Joe Grass conclure.

Le ton de Wave est dès lors donné. Exploitant une large plage dynamique, les arrangements mélangent de brillante façon des éléments qui semblent résumer toute la discographie du chanteur. Les cordes de Wooden Arms et Adventures In Your Own Backyard se mélangent aux synthétiseurs de Love Songs For Robots et aux effets sonores de Close To Paradise.

Les pièces de l’album s’enchaînent ainsi comme une série de vagues puissantes qui charrient différentes ambiances : rêveuse sur Drive, mystérieuse sur Wild Flower, voire sensuelle sur Melody Noir. Mais la tristesse n’est jamais très loin. Elle donne lieu aux moments les plus poignants de Wave, notamment avec Here Comes The River, le dernier morceau de l’album.

Celui-ci compare les difficultés de l’existence à une rivière qui vous emporte. Des violons magnifiques viennent renforcer la métaphore, montant tranquillement de niveau jusqu’à noyer la voix du chanteur.

Patrick Watson signe ainsi un album bouleversant, son plus abouti jusqu’ici, peut-être le plus puissant de sa carrière.

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