Critiques

Model/Actriz

Pirouette

  • True Panther Records
  • 2025
  • 41 minutes
8,5
Le meilleur de lca

Je vais faire tout mon possible pour rester la plus impartiale et objective possible pendant cette critique (même si, bon, l’art, ça reste subjectif), mais LÀ, on touche à un point sensible chez moi. Avec son rock industriel et noise à l’orée entre Xiu Xiu et Nine Inch Nails, Model/Actriz, composé de Ruben Radlauer (batterie), Jack Wetmore (guitare), Aaron Shapiro (basse) et mené par Cole Haden, est un groupe qui s’est hissé très très rapidement dans la liste de mes groupes préférés, Dogsbody devenant vite un de mes albums phares de cette décennie. Abrasif, dérangé, dansant et osé. D’ailleurs, je suis allée les voir l’année dernière à l’Olympia et Cole avait chanté à un centimètre de mon visage pendant 30 bonnes secondes. Une expérience de concert que je chéris encore à ce jour.

Inutile de dire donc que ma hâte pour leur deuxième album, Pirouette, était immense. Les trois premiers simples, Cinderella, Doves et Diva, étaient tous des BOPS, comme on dit maintenant. Cette énergie résolument queer avec plus de sonorités électroniques et irrévérencieuses, j’étais absolument friande. Entre la grandeur du titre Cinderella, les vestiges de l’horreur de Dogsbody sur Doves et l’expérimentation de Diva (et sa finale quasi industrielle à la Nine Inch Nails, comme il est mentionné plus tôt) … Comment ne pas s’attendre à de l’excellence absolue sur Pirouette?

Eh bien, j’avais bien raison de croire à un digne successeur à Dogsbody, car Pirouette récupère tout ce qui faisait la force du disque précédent et y rajoute un espoir et une joie de vivre profonde. Si leur premier projet se lisait comme un cri à l’aide et une lamentation, ce nouvel opus célèbre la vie sur un air d’apocalypse. Si le monde part en lambeaux devant nous, nous danserons au beau milieu des flammes. La première piste, Vespers, n’offre aucun répit pour l’auditeur : c’est comme si nous nous étions laissés directement après Sun In, dernière piste de leur premier album. On a l’impression que notre protagoniste s’est remis des évènements passés et est à présent prêt à reconquérir le monde. « Are you free enough to be a bitch, but graciously? » Les paroles, bien qu’elles soient toujours aussi fascinantes dans leur étrangeté, sont à présent teintées d’une attitude et d’une insolence qui fait du bien. Le frontman dit s’inspirer de Lady Gaga et de la comédie musicale Cats dans son art et, quelque part, ça se ressent.

Prenez juste cette ligne dans le morceau Diva: « I’m such a fucking bitch… girl, you don’t even know. » Encore une fois, écrit comme ça, ça peut paraître banal, mais la voix de Haden fait toute la différence : entre le chant (qui s’est d’ailleurs gagné en puissance sur cet album), le râlement, la menace et la provocation, sa palette est versatile et offre des reliefs uniques et enivrants aux onze pistes de Pirouette. En ce moment, ma piste préférée parmi les nouveaux titres se trouve probablement dans le titre Departures. Entre les notes de guitares sèches et infiniment accrocheuses, la mysticité du morceau (entre les références à Osiris, à Perséphone, à Marie Madeleine…), ainsi que la déclaration d’émancipation de Cole Haden face à son partenaire et/ou son audience : « Let me be your girl. » Ça sort tellement du cœur, et je trouve que l’énergie sensuelle qui s’en dégage est DÉLICIEUSE. Le duo Audience et Ring Road, lui, sort tout droit des boîtes de nuit les plus crasses et punks. Le bruit se fait cacophonique, le mix est difficile à déceler, et les sonorités sont presque horrifiques. Je veux blaster ces morceaux aux Foufounes Électriques, juste voir ce que ça donne.

Au-delà de tous ces morceaux qui font suer dans la fosse, Model/Actriz a également réussi à bonifier la science des morceaux lents et introspectifs. L’interlude vulnérable Headlights suivie par Acid Rain, avec sa guitare acoustique et son extrême sensibilité, en sont la preuve. « I sing in part because you often told mе that you liked to listen,” nous livre Haden dans un falsetto qu’on a rarement entendu de sa part. J’en ressors presque émue. Cette douceur est extrêmement bien maîtrisée, et on se rend compte que Model/Actriz excelle sur tous les terrains possibles de la musique industrielle et rock. Baton, dernière piste de l’album, montre à quel point le quatuor a élargi sa musique vers des horizons nouveaux et excitants, montrant que rien ni aucun style musical n’est hermétique à la patte Model/Actriz. Honnêtement, en décembre, je ne sais pas si Pirouette se hissera haut dans les tops albums de 2025 de bien des gens, mais il a de fortes chances d’être dans le mien.

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