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Lucy Dacus

Home Video

  • Matador Records
  • 2021
  • 46 minutes
7,5

C’est en 2016, à l’âge de 21 ans seulement, que Lucy Dacus a signé son premier contrat d’enregistrement avec la maison de disques Matador. Après le long format No Burden, réédité la même année, l’auteure-compositrice-interprète récidivait avec Historian (2018) ; une création qui portait sur les désillusions amoureuses et le manque d’empathie chronique de ses compatriotes qui, à l’époque, vivaient leur « moment Trump ». Toujours en 2018, Dacus unissait ses forces à deux des plus importantes chansonnières de leur génération, Phoebe Bridgers et Julien Baker, pour former boygenius. Cette fille est une surdouée.

Lucy Dacus est de retour avec un album titré Home Video. Sur cette nouvelle offrande, l’artiste se retrempe dans son adolescence tourmentée et vécue dans sa ville d’origine, Richmond, Virginia. Elle nous propose une sorte de journal intime à ciel ouvert exposant son passé librement et sans fard. Même les moments les plus sombres sont évoqués avec une honnêteté désarmante et cette franchise transparaît dans la vaste majorité des chansons de l’album. Cet exercice qui aurait pu verser dans une surenchère d’émotions ou dans une lassante nostalgie s’avère plutôt senti.

Dans Christine, Dacus raconte l’histoire d’une amie sur le point d’épouser un homme inadapté qui l’a fait souffrir énormément. Elle y va d’une tirade qui en dit long sur sa détermination à la convaincre d’éviter cet engagement :

If you get married, I’d object

Throw my shoe at the altar and lose your respect

– Christine

Dans la grandiose et conclusive Triple Dog Dare — coup de chapeau à ce solo de guitare magnifiquement criard —, elle exprime son ressentiment envers une relation amoureuse qui n’est pas allée au bout de ses promesses :

I never touched you how I wanted

– Triple Dog Dare

Musicalement, l’Américaine incorpore à son folk rock habituel des influences « heartland rock » — Bruce Springsteen et Tom Petty en tête de liste — incluant quelques sonorités inspirées par la pop des années 80. Trois guitares, une basse, une batterie et quelques claviers suffisent pour capter notre attention. Respectant à la lettre la tradition états-unienne (peut-être un peu trop), Lucy Dacus raconte malgré tout ses histoires avec une maîtrise et une maturité qui l’honore.

L’artiste a fait le choix d’opter pour la sobriété orchestrale évitant ainsi l’esbroufe et la grandiloquence… ce qui crédibilise le « storytelling » de ses chansons. Sans être aussi prenant qu’Historian, ce nouveau chapitre dans la carrière de Lucy Dacus confirme hors de tout doute le talent qui l’habite.

Parmi les moments forts, on note la très « spingsteennienne » First Time, la dépouillée et aérienne Thumb, le folk dénudé Going Going Home, la jouissive déflagration de guitare dans VBS et l’émouvante Please Stay. Une seule ombre au tableau : l’utilisation inutile et plaquée de l’Auto-Tune dans Partner in Crime qui détonne de l’ensemble de l’œuvre.

Home Video est en parfait équilibre entre spiritualité et matérialité, entre jeunesse et sagesse. Un disque qui a du cran conçu par une vieille âme.

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