Louis-Jean Cormier
Les grandes artères
- Simone Records
- 2015
- 52 minutes
C’est cette semaine que paraît le très attendu (euphémisme) dernier rejeton du populaire Louis-Jean Cormier titré Les grandes artères. Populaire n’est pas utilisé ici avec ironie, car ce succès, Cormier l’a chèrement gagné, à la sueur de son front, grâce à son immense talent et après des années de galère au sein de Karkwa. Le précédent effort, Le treizième étage, a recueilli l’approbation critique et du plus grand nombre. Exploit.
Évidemment, la parenthèse La Voix a accéléré grandement ce triomphe, mais il s’agit de jaser longuement avec Cormier pour comprendre l’intention qui se camouflait inconsciemment derrière la décision du bonhomme. On vous invite humblement à lire l’excellente entrevue réalisée par l’acolyte LP Labrèche. Cela dit, malgré le grand respect que l’on porte au travail de Louis-Jean Cormier, est-ce que ces Grandes artères se figent ou si au fil des écoutes, on se laisse séduire par ce disque mélancolique?
En premier lieu, voilà un album qui aborde les thèmes de la rupture et du chagrin amoureux, et ce, sans compromis, avec en trame de fond le vertige d’une vie qui fout le camp et qui va peut-être un peu trop vite. On ne peut que faire des associations évidentes avec la «cormiermania» qui a pris des proportions colossales suite à la «période» La Voix. Cormier réussit à exprimer le désarroi et le tumulte intérieur avec une éloquence poétique de haut niveau. Sur ce plan, on dit un immense bravo!
Musicalement, on a quelques petites réserves. Tout au long de l’écoute, une impression d’être assis entre deux chaises s’est emparée de nous comme si ces Grandes artères souffraient d’un manque de cohésion au niveau de la direction artistique. Si Le treizième étage était un disque foncièrement structuré, cette tentative tire vers plusieurs directions. Se côtoient du folk/banjo à la Sufjan Stevens (Traverser les travaux), du rock karkwaïen (Vol plané), du rock psyché (St-Michel), du soft-rock (Faire semblant), des parcelles symphoniques (Tête première), l’ensemble élégamment orchestré. Voilà un disque dont la plupart des arrangements sont splendides… mais qui servent parfois à masquer les moments faibles de certaines chansons.
Malgré ces quelques impairs, ça demeure un disque de Louis-Jean Cormier… Donc, une création de qualité. Parmi les bons moments, on a affectionné la jouissive St-Michel (un rock psychédélique qui exulte à la finale), la prenante balade folk, qui atteint le nirvana au «bridge», intitulée Le jour où elle m’a dit…, la fédératrice Complots d’enfants (une pièce de Félix Leclerc) évoque quant à elle le dynamisme du Treizième étage, l’intimiste Les hélicoptères, le lent crescendo de Deux saisons trois quarts ainsi que la superbe Montagne russe; titre qui résume à lui seul le récent parcours de Cormier, mais aussi la trajectoire un tantinet instable de ces Grandes artères.
Ne vous méprenez pas, ce disque est résilient et fait son chemin tout en douceur dans le cortex cérébral. Cependant, après un opus aussi unificateur et redoutable que Le treizième étage, nos attentes étaient probablement trop élevées. Cela dit, ne boudez pas votre plaisir! Louis-Jean Cormier fait encore preuve musicalement de son envergure. On a peut-être affaire ici à un disque qui prendra de l’ampleur au fil des écoutes.
Ma note: 7,5/10
Louis-Jean Cormier
Les grandes artères
Simone Records
52 minutes
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