Critiques

Lightning Bolt

Sonic Citadel

  • Thrill Jockey Records
  • 2019
  • 53 minutes
7,5

En bons maniaques, Brian Gibson et Brian Chippendale de Lightning Bolt ont passé le dernier quart de siècle à pousser à l’extrême une formule déjà extrême en soi. Sur leur 7e album studio, Sonic Citadel, les deux énergumènes ajustent savamment leur noise punk, le rendant plus intelligible sans concéder en originalité.

Pour schématiser, Lightning Bolt est la fusion cataclysmique de la basse distordue de Gibson et de la batterie frénétique de Chippendale. Vous l’aurez compris, c’est vraiment, vraiment bruyant. Et c’est quelque part entre Mr. Bungle et Primus sur le spectre de la musique saugrenue. Mais en rester là serait réducteur, car les Brian ont développé un langage musical varié et complètement idiosyncrasique, malgré les limites évidentes qu’impose leur formule.

Plus accessible qu’à peu près tout ce qui précède chez Lightning Bolt, Sonic Citadel est un alliage inusité entre le décapant et l’accrocheur. En ce sens, c’est une certaine consécration des expérimentations disjonctées du duo américain. Fait rare dans sa discographie, le contour des pièces est clairement défini et leur construction suit une logique rock assez franche. Seule la délicieusement difforme Van Halen 2049 échappe à la règle ; d’ailleurs, l’impression confuse qu’elle laisse en clôturant l’album est peu représentative des morceaux précédents.

Les hymnes glorieux Hüsker Don’t, Big Banger ou encore Bouncy House sont des concentrés parfaits de l’essence de Lightning Bolt ; ils sont denses, dévastateurs, ludiques, jouissifs. Et même si leur forme est relativement contenue, ils canalisent une puissance inouïe par leur qualité mélodique. Autrement dit, l’envie nous démange de plonger dans un moshpit et de beugler à tue-tête l’air des riffs corrosifs de Gibson.

Il est par contre difficile de s’imprégner profondément de Sonic Citadel tellement la musique est expressionniste, sursaturée. Les propositions de Lightning Bolt sont parfois si intenses qu’elles admettent peu de nuances émotionnelles. Sonic Citadel brille dans ce qu’il aspire à être, soit défoulant et truculent, mais peut aussi souffrir des contraintes esthétiques qu’imposent certaines idiosyncrasies bizarroïdes, comme la voix altérée de Chippendale, généralement indéchiffrable et parfois lassante.

Mais s’empêtrer dans une analyse trop cérébrale de la musique de Lightning Bolt serait mal comprendre son attrait. Sonic Citadel a beau regorger de complexité et d’originalité sous son vernis punk, il se veut avant tout radicalement amusant et doit être appréhendé comme tel.

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