Critiques

Light Conductor

Sequence One

  • Constellation Records
  • 2019
  • 39 minutes
7,5

« Une soupe cosmique. » C’est ainsi que le label montréalais Constellation décrit le nouveau projet de Jace Lasek (The Besnard Lakes) et de Stephen Ramsey (Young Galaxy). Réunis sous le nom de Light Conductor, ils nous arrivent avec un premier album intitulé Sequence One, une œuvre contemplative qui combine adroitement la musique ambiante, l’expérimentation électronique et le space-rock.

S’il y a un mot pour décrire la musique de Light Conductor, c’est la patience. En effet, Lasek et Ramsey prennent tout leur temps pour développer des pièces qui se caractérisent par des structures très simples et volontairement répétitives. Les deux musiciens se connaissent très bien et s’amusent depuis quelques années à créer des « improvisations lentes » en utilisant des synthétiseurs modulaires.

La première face du disque est composée de deux pièces qui, en réalité, n’en forment qu’une seule. D’une durée de plus de onze minutes, A Bright Resemblance est basée sur une mélodie de six notes répétée en boucle. Le rythme est lent, avec de subtiles variations de textures : ici une basse pour asseoir la pulsation, ici un thérémine qu’on dirait sorti d’un vieux film de science-fiction. L’ensemble peut rappeler un groupe comme Tangerine Dream, mais aussi la musique minimaliste dans la tradition de Steve Reich, Terry Riley, La Monte Young ou alors Philip Glass.

La pièce s’enchaîne avec Chapel of the Snows, elle aussi construite selon le même motif de six notes mais qui se désagrège en un long bourdon (drone). De ce bruit blanc émergent finalement des notes vers la fin du morceau, avec des sonorités de synthétiseurs qui ressemblent presque à des violons. La musique s’éteint comme elle a commencé au début du disque, doucement et sans qu’il n’y ait eu vraiment de pic d’intensité. L’important ici n’est pas la destination, mais le voyage.

La face B s’ouvre sur la pièce la plus monocorde de l’album, intitulée Far from the Warming Sun, qui s’articule autour d’une lente pulsation électronique. L’absence de mélodie ou d’harmonie crée forcément une impression de vide, même si on se doute bien que c’était là l’effet recherché par Lasek et Ramsey. N’empêche, sur une durée de plus de dix minutes, le tout s’avère parfois un peu trop statique.

Les deux dernières pièces de l’album forment elles aussi une sorte de diptyque. When the Robot Hits the Water marque un changement de tempo vers une pulsation plus rapide, avec des effets électroniques à la On the Run de Pink Floyd. Mais on pense surtout au travail de Boards of Canada, pour le côté très rétro de ce mélange entre électronique et psychédélique. Et ce n’est sans doute pas un hasard. Tout comme le duo écossais, Lasek est un partisan de la bonne vieille technologie analogue dans son travail de réalisateur et Sequence One, enregistré au studio Breakglass, témoigne de cette quête d’une sonorité imparfaite, comme altérée par le temps.

L’album atteint son point culminant sur la pièce éponyme Light Conductor, le seul titre qui évoque de loin l’univers sonore des Besnard Lakes. C’est dû entre autres à l’entrée en scène d’une guitare électrique mais aussi à la présence de la voix de Catherine McCandless, la femme de Ramsey et sa partenaire dans Young Galaxy. On comprend alors que Sequence One doit être perçu comme un tout, avec cette lente progression nous menant jusqu’à cette finale krautrock explosive.

Sequence One est un album un peu déroutant pour quiconque s’attend à retrouver quelque chose qui s’apparenterait de près ou de loin au psych-rock teinté de shoegaze des Besnard Lakes ou (encore moins) à la dream pop de Young Galaxy. Mais il s’agit d’une œuvre cohérente, un peu en-dehors de son époque, qui s’apprécie davantage avec une paire d’écouteurs ou plongé dans une obscurité complète.

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