Critiques

Johnny Marr

Call the Comet

  • New Voodoo
  • 2018
  • 58 minutes
7

Après avoir collaboré avec d’innombrables formations (Electronic, The The, Modest Mouse, etc.), l’ex-guitariste des Smiths, Johnny Marr, a entamé officiellement une carrière solo en 2013. Sans que ce soit foncièrement inintéressant, The Messenger faisait ressortir les faiblesses mélodiques de Marr, le chanteur. Un an plus tard, le musicien récidivait avec Playland : un album où on voyait poindre à l’horizon une amélioration vocale substantielle, malgré les chansons quelconques qui caractérisaient ce disque. Âgé aujourd’hui de 54 ans – et après 4 ans d’absence – le Mancunien d’origine revenait à la charge avec son troisième album solo intitulé Call the Comet. Enregistré au Crazy Face Studios – studio d’enregistrement situé dans sa ville de naissance – est-ce que Marr assume enfin et pleinement son « nouveau » rôle d’auteur-compositeur-interprète ?

Arborant un son de guitare légèrement plus abrasif qu’à l’accoutumée, délaissant le penchant post-punk de ses deux premières créations, Marr nous propose un premier album réellement incarné, préconisant une approche mélodique nettement plus confiante. Le virtuose est totalement libéré du lourd héritage des Smiths ainsi que de cette étiquette de « guitar god » affublée par une panoplie de journalistes musicaux britanniques. L’homme accepte et endosse pleinement sa fonction de « songwriter ». Ainsi, l’instrumentiste nous présente son album le plus audacieux, même si ça demeure nostalgique.

Call the Comet demandera à l’auditeur d’y consacrer une bonne heure de son précieux temps et il aurait été préférable de couper un peu dans le gras, particulièrement en fin de parcours (Spiral Cities et My Eternal ). Cela dit, ce nouveau chapitre dans la carrière solo de l’artiste s’écoute bien du début à la fin et constitue un agréable périple pop-rock, mélodiquement efficace… la principale faiblesse des précédents efforts ! Et il faut l’avouer, Marr est d’un commerce nettement plus agréable que Morrissey. Je dirais même que Marr est aujourd’hui plus intéressant, comme homme et comme artiste, que l’imbuvable Moz.

Parmi les meilleures pièces de l’album, je vous suggère fortement de prêter l’oreille aux quatre premières chansons : The Tracers (en parfait équilibre entre pop, rock et superpositions de guitares tranchantes), Hey Angel (subtil alliage de brit-pop et de glam-rock à la T.Rex) et Hi Hello (magnifiquement calqué sur le classique des Smiths, There Is a Light That Never Goes Out). New Dominions rappelle les meilleurs moments de Bauhaus et Suicide. Walk Into the Sea possède une dimension « dramatique » qui ne fait pas partie de la démarche habituelle de Marr. Actor Attractor remémore l’approche mélodique de Dave Gahan de Depeche Mode et incorpore un léger soupçon de krautrock qui a plu à l’auteur de ces lignes.

Pas de doute, c’est le meilleur album solo de Johnny Marr. Ce n’est pas la révolution. Bien sûr, c’est quelque peu « passéiste », mais les vieux de la vieille, aficionados des Smiths et de la cold wave de la fin des années 70, sauront apprécier ce disque à sa juste valeur. Pour les amateurs de modernité et d’avant-gardisme, vous passerez probablement votre tour.