En 2018, le contrebassiste et compositeur jazz Hugo Blouin avait fait paraître le volume 1 de Charbonneau ou les valeurs à’ bonne place. L’idée était originale: bâtir un album en utilisant des extraits de la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction, mieux connue sous le nom de la Commission Charbonneau. Tony Accurso, Gérald Tremblay et autres Francesco Del Balso étaient accompagnés de musique jazz et de chœurs langoureux. L’album a même gagné le prix Opus du meilleur concert jazz, en 2020. Hugo Blouin récidive avec le volume 2, paru quatre ans plus tard. Sur la présentation de Bandcamp, Blouin écrit « Le volume 2, c’est les tounes qui manquaient au premier ». Est-ce vraiment le cas?

Le discours était nécessaire, ne serait-ce que par le texte. En effet, cette chanson reprend le discours d’ouverture de la Commission, par France Charbonneau elle-même. Elle se rapproche d’ailleurs beaucoup de certains aspects du volume 1, avec son travail musical en arrière. Elle n’est pas juste simplement collée au rythme de la voix de Charbonneau. La belle grosse chaîne aussi a plusieurs accointances avec l’album de 2018. Mettant en vedette l’entrepreneur et ex-syndicaliste Bernard « Rambo » Gauthier, elle utilise un deuxième procédé présent dans le premier volet: suivre le rythme du personnage avec la musique et les voix des chœurs. On n’y entend pas toujours très bien les paroles, par contre: c’était ce même désavantage que l’on avait noté sur certaines pièces d’il y a quatre ans. Par contre, la guitare du légendaire René Lussier rend la chanson vraiment intéressante et colle tout à fait à l’image qu’on se fait du personnage coloré. Le jeu de Lussier tire beaucoup sur le free jazz.

Le chœur à quatre voix (Julie Hamelin, Jean-Philippe Loignon, AndréAne Robichaud et Kathryn Samman) est mis de l’avant dans Charbonneau ou les valeurs à’ bonne place, volume 2. Dans Une business, il a un côté qui tire vers l’opéra. On était sollicités lui laisse également toute la place avec une instrumentation moins forte. Ça permet entre autres d’entendre bien ce qui s’y dit.

La chanson la plus fascinante et la plus tordue de l’album est Bien dans ma peau, qui reprend certains propos tenus par l’ancien maire de Montréal Gérald Tremblay. Alors que les autres misent sur le chœur à quatre voix, Bien dans ma peau accueille des invité.es habitué.es aux scènes expérimentales (Sarah Albu, Gabriel Dharmoo, Elizabeth Lima et David Cronkite). Ils apportent un esprit totalement éclaté à la pièce, font des superpositions de voix avec celle de Gérald Tremblay et improvisent différents sons. C’est la pièce la moins accessible de l’album et la plus riche pour le jeu sonore.

Charbonneau ou les valeurs à’ bonne place volume 2 est une belle continuité du premier, avec de bonnes surprises musicales qui se révèlent lors d’une écoute moins distraite.