
Horsegirl
Phonetics On and On
- Matador Records
- 2025
- 38 minutes
Voici un autre album qui a failli passer sous mon radar, mais dont je me fais un plaisir de parler ici. Le trio Horsegirl, originaire de Chicago, est composé de trois femmes : Nora Cheng, Penelope Lowenstein et Gigi Reece. Dit comme ça, ça ne vous sonne sûrement aucune cloche, et cela a été mon cas. Pourtant, avec leur nouvel album, Phonetics On and On, elles méritaient tout de même qu’on y jette un petit coup d’œil. D’autant plus qu’avec les températures d’hiver, leur indie-rock était parfait pour l’ambiance générale. Et effectivement, sur cet aspect, j’ai visé juste.
L’album est, en effet, parfait pour l’hiver. Mais au-delà de cette simple assertion, c’est un disque empreint d’une patte « années 90 » généralement bien maîtrisée, notamment sur Julie, autre simple de l’album, morceau mené par une guitare simple et une basse réconfortante et enjouée arrière. Par exemple, les guitares sur Rock City donnent un charme rétro à l’ensemble. « Quelle belle époque c’était, quand même », on a presque envie de se dire. Pareil pour In Twos, qui m’a carrément ramenée dans le temps, où j’avais écouté Crush d’Ethel Cain pour la première fois. Je pouvais ressentir la charge émotionnelle du morceau rien qu’avec ses notes de guitares et de basses appuyées et chaleureuses. On retrouve cette ambiance sur Sport Meets Sound, là où on se croirait presque dans les gradins d’un stade de football en plein automne. Oui, c’est le genre d’images qui me viennent en tête, j’ai exactement le lieu en tête. Sur Julie, cette même douceur règne également, avec des phrases comme: « We have so many mistakes to make, mistakes to make with you // I want them too ». Avec Horsegirl, nous n’avons pas à avoir peur de nous tromper, de cafouiller, de ne pas faire « comme les autres ». On n’a qu’à être nous-mêmes, et cela suffit.
Phonetics On and On décide donc de ne pas trop se prendre la tête. Les onomatopées sont de mise sur ce projet, entre divers « la la la », « oh oh oh » et « da da da ». On se rapproche presque d’une session de ‘jam’ entre amies, ce qui, quelque part, insuffle une honnêteté légère à l’album qui fait du bien. La piste 2468 est empreinte d’une joie de vivre innocente et d’un esprit d’improvisation qui surprend. On a envie de faire partie de leur groupe et de laisser libre cours à notre imaginaire, sans peur du jugement ou des codes classiques de la musique. Pourtant, cette nonchalance peut néanmoins se présenter comme un inconvénient sur d’autres aspects du projet. À plusieurs moments, les instruments prendront le pas au point que les voix se noieront dans ce mélange et perdront en pouvoir et en impact. Résultat : on se retrouve avec des morceaux agréables, mais plutôt linéaires. Sur l’intro du disque, Where’d You Go, ces mêmes voix s’entremêlent dans une harmonie de voix quelque peu désordonnée et hésitante, ce qui nous empêche de véritablement nous immerger dans leurs chœurs. Par ailleurs, certains morceaux vont bien s’enchaîner et se suivre, mais ceux-ci finissent par ultimement se ressembler. Ainsi, en écoutant l’album d’une traite, notre écoute se rapproche d’une séance continue de jam. Cela peut être une expérience innovatrice, dans un sens, mais c’est une homogénéité qui s’étire, parfois inutilement.
Néanmoins, avec quelques autres pépites comme la très rythmée Switch Over (malgré son contenu textuel un peu répétitif) ou encore Information Content, qui fait sourire avec une batterie discrète, mais qui frappe dans le mille de par son efficacité simple. Parfois, il faut juste cesser de se creuser la tête et se laisser emporter par le flot constant de la musique. Et ça, c’est libérateur. Donc oui, Phonetics On and On est imparfait, mais pourtant, je ne peux pas m’empêcher d’apprécier ce disque pour ce qu’il représente émotionnellement parlant pour Horsegirl, mais aussi pour nous, simples auditeurs. C’est un album fait sous l’égide de l’amour et de la solidarité. Et aujourd’hui, l’amour, c’est d’utilité publique, à ce stade. C’est cette dose d’amour dont nous avons besoin. Et pour un album sorti le jour de la Saint-Valentin, je trouve ça plutôt poétique.