Critiques

Félix Brassard

Comme je noir

  • Indépendant
  • 2025
  • 29 minutes
8
Le meilleur de lca

Ma première impression de Félix Brassard a été celle d’un artiste proposant un folk contemplatif planant. Le genre de musique apaisante qu’on écoute en travaillant, car elle a la faculté de ne pas trop nous déconcentrer. En tendant l’oreille, j’ai réalisé assez rapidement qu’au contraire, ce musicien ne mérite rien de moins qu’une attention indivise de la part de ses auditeurs.

Il y a une profonde richesse musicale à apprécier dans le premier projet francophone de celui qui a vécu au Viêt Nam durant son enfance. D’abord, Brassard nous démontre qu’il maîtrise la guitare acoustique sous toutes ses facettes en offrant des mélodies diversifiées et impressionnantes d’un point de vue technique. Le picking est particulièrement intéressant sur Le silence, une pièce d’une grande intensité qui clôt admirablement bien l’album.

Débris de rien
De rien, de rien
Sautant muets de mes doigts
Comme une chanson sans voix
Vivre en silence
Le silence

De plus, les motifs créatifs qui sont brodés autour de cet instrument central sont intégrés en toute subtilité, et assurés par des instruments classiques, comme le piano, la flûte traversière ou le cor français. Vous aurez un aperçu très juste de ce beau travail d’orchestration à l’écoute d’Étrange tumulte, sans doute la chanson la plus accrocheuse du disque. Vous remarquerez aussi que cette trame sonore lumineuse fait joliment contraste à la voix grave du chanteur, qui rappelle parfois celle de Stefie Shock. La ressemblance avec ce dernier est particulièrement frappante sur Le vaisseau.

Au-delà de ses talents de compositeur et de musicien, Brassard se démarque par son concept fédérateur : celui du voyage. Ce thème est perceptible dans la structure sinueuse des pièces, mais également au travers des influences internationales omniprésentes. Par exemple, L’imaginaire présente une certaine parenté avec la samba, un genre musical qui, rappelons-le, avait aussi inspiré Harmonium dans la pièce Si doucement tirée de leur album éponyme. Aussi, on comprend dès les premières notes de Boulevard des inconnus que le sitar (qu’il a ramené d’Inde) sera un acteur important. Cet instrument atypique donne une belle couleur à la musique de Brassard, et sa présence constitue à elle seule une raison suffisante pour découvrir cet artiste. L’évasion est aussi perceptible dans les textes, notamment dans Vagues folles qui nous entraîne vers d’autres continents. Fermez les yeux et concentrez-vous un peu, vous aurez l’impression d’être ailleurs.

Les vagues folles
Reflet des nôtres
Qui implorent de vivre
Les miroirs d’âme
Récitent l’ode
L’ode à s’enfuir
Et s’éblouir
Vagues folles

Bref, Comme je noir est une œuvre mature, achevée et bien ficelée qu’on apprécie de plus en plus au fur et à mesure qu’on l’écoute. Si ça peut prendre un certain temps avant de percer ce trésor d’outre-mer, je vous assure que la patience en vaudra la peine.

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