Fauve
Vieux Frères Partie 2
- Fauve Corp
- 2015
- 39 minutes
La première partie de Vieux Frères a déjà un an. Voilà douze mois presque jour pour jour que le collectif français Fauve lançait leur premier album. Un album qui était très attendu. Le résultat était bon. Pas excellent, mais tout de même bien appréciable. Entre le maxi et le premier opus, le groupe semblait avoir évacué un peu trop d’urgences. Les mots avaient toujours du mordant, mais manquaient de poigne. Voici que la deuxième partie de Vieux Frères vient remettre les pendules à l’heure.
Malgré ces quelques réserves, Fauve a tout de même atteint la certification Or en France, vendant au-delà de 50 000 copies, ce qui en 2014, n’est pas anodin. Ce deuxième volume risque de tout autant charmer l’auditoire. Vieux frères partie 2 ramène l’équilibre, on retrouve cette urgence de vivre, cette nécessité de la parole qui habitait Blizzard. L’exemple le plus limpide est la hargneuse T.R.W. qui commence avec: «J’ai jamais vécu de happy ends ailleurs que dans des salons de massages douteux d’Asie du Sud-est». Le tout sur une trame parfaitement répétitive. Une pièce qui refuse toute capitulation devant les utopies à cinq sous et la violence absurde. Fauve préfère se recentrer sur la réalité qui n’est jamais aussi noire ou blanche que l’on croit: «Peut-être que la vie est une chienne, c’est vrai qu’on entend ça parfois, en attendant, moi je vois des milliards de choses douces et belles, c’est pas du sable artificiel, c’est du métal très solide comme le parfum des fleurs, je ne vivrai pas sous le règne de ta terreur». Des paroles qui peuvent tout aussi bien s’appliquer à une relation malsaine qu’aux tristes événements qui se sont passés en France dans les dernières semaines.
Le collectif accouche de textes magnifiques sur ce deuxième volet. Héritier de la grande tradition orale française, Fauve la rend actuelle et vivante. Juillet (1998) qui ouvre le deuxième volet peint un tableau limpide des rues de Paris desquelles est issu le quintette. Pour refrain, on a droit à un constat de vieillesse: «J’ai 27 ans bientôt 28, c’est fou comme le temps file, j’ai 27 ans bientôt 28, et je pourrai me dire que mes belles années sont derrière moi». Cela pourrait paraître comique à un baby-boomer, mais une génération au complet comprendra très bien de quoi il en retourne. La trentaine veut maintenant dire l’âge adulte, celui où l’on s’installe, où on se calme, où on se resitedemo.cauit.
Fauve est définitivement inscrit dans cette génération. Cette jeunesse qui se pose beaucoup de questions par rapport au monde, à la politique, à l’amour, à l’unité familiale. Une génération marquée par l’internet, la rapidité de l’information, l’ouverture sur le monde. Une génération qui est assez vieille pour avoir vu ses illusions se fracasser, mais trop jeune pour avoir abandonné tout espoir. Ça se sent sur Vieux Frères, c’est dans le tissu même de la poésie. Les trames sont tout aussi solides sur ce deuxième volume. De la guitare accrocheuse et dansante de Tallulah au piano «old school» de Bermudes, c’est toujours magnifiquement calibré.
C’est mission accomplie pour Fauve avec Vieux Frères Partie 2. Le collectif semble avoir trouvé le parfait équilibre entre l’urgence agressive de Blizzard et la poésie posée de la première partie. Fauve ne plaira pas à toutes les oreilles, mais viendra chercher l’amoureux des mots. C’est une réelle poésie campée dans la réalité que nous offre le collectif français.
Ma note: 8/10
Fauve
Vieux Frères Partie 2
Fauve Corp
39 minutes
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