Critiques

Le Trouble

Making Matters Worse

  • Indica Records
  • 2017
  • 33 minutes
7

Il faut parfois partir loin de chez soi pour prendre conscience qu’on est finalement bien à la maison. En 2014, le groupe montréalais Le Trouble semblait promis à une carrière internationale après la parution d’un premier EP encensé par la critique (dont le chic magazine Spin), réalisé sous l’égide de la maison de disque de Los Angeles Lava Records (le même que Lorde) et qui lui avait valu une prestation à Osheaga.

Mais voilà, le rêve américain n’est pas toujours aussi idyllique qu’il n’y paraît (encore moins depuis l’élection de vous savez qui…) Déçue de son expérience, le quintette mené par le chanteur d’origine australienne Michael Mooney a finalement choisi de signer avec la maison Indica, plus en phase avec ses valeurs et ses aspirations. Et c’est ainsi que nous arrive enfin le premier album complet du groupe.

La première chanson de Making Matters Worse semble d’ailleurs faire écho à ce parcours tumultueux emprunté par Le Trouble : « Baby/We did it our way/Do it our way/We chased it/We did it our way/Do it our way », chante Mooney sur l’entraînante How Was I Know? Musicalement, l’esthétique de la chanson demeure fidèle au son du groupe depuis ses débuts il y a cinq ans, avec ses guitares tranchantes d’inspiration punk et ses refrains accrocheurs, style pop bonbon.

Si le résultat est plus léché que sur l’EP Reality Strikes, le groupe a conservé son approche garage, avec cette énergie presque adolescente qui se dégage de chansons comme White Knuckles, Ghost Surfer USA ou Fistful of Glitter, le tout porté par des mélodies riches qui s’imposent telles des vers d’oreille. On ne s’étonne pas d’ailleurs d’apprendre que Mooney et le guitariste Maxime Veilleux se sont connus à une époque où ils écrivaient des jingles pour les pubs et la télévision.

Comme l’illustre la pochette de ce Making Matters Worse, qui semble montrer un appartement sens dessus dessous au lendemain d’une fête qui a mal viré, la musique du Trouble en est une de party, qui vise avant tout à divertir. Il y a bien quelques exceptions, comme l’étonnante Easy Enough, d’inspiration dream pop avec sa voix éthérée et sa rythmique électro. Mais pour un groupe qui s’abreuve au punk, en tout cas dans l’esprit, on aurait souhaité quelque chose d’un peu plus grinçant. Oui, les guitares sont sales, mais l’ensemble reste relativement propret.

Musicalement, Le Trouble parvient à proposer quelque chose de singulier et original, même si on entend toutes sortes d’influences qui s’enchevêtrent. Il y a un petit côté The Clash dans l’énergie et l’attitude, un peu de Malajube dans les riffs accrocheurs et les hymnes pop et les sonorités de guitare peuvent parfois évoquer The Dears ou Wolf Parade. Et cette voix polyvalente de Mooney, capable de sonner tantôt comme un Rod Stewart en mode rauque ou un Patrick Watson en falsetto.

Au final, le groupe complété par le guitariste Bao-Khanh Nguyen, le bassiste Garrett Dougherty et le batteur Jesse Gnaedinger peut se féliciter d’avoir fait le pari de la patience, ce qui lui permet d’offrir un album cohérent, honnête et sincère, et qui laisse entrevoir un beau potentiel pour ces gentils fauteurs de trouble.

Ma Note: 7/10

Le Trouble
Making Matters Worse
Indica Records
33 minutes

http://www.letrouble.com/

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