Critiques

Bonnie Prince Billy

Best Troubadour

  • Drag City
  • 2017
  • 57 minutes
6

Le folkeux états-unien, l’homme qui a arboré de multiples pseudonymes, Will Oldham, alias Bonnie Prince Billy, présentait la semaine dernière un nouvel album titré Best Troubadour; un hommage qui contient 16 relectures d’un des « countrymen » parmi les plus respectés qui soient : Merle Haggard. La légende de la musique country américaine s’est éteint, il y a un peu moins d’un an, et son œuvre a semble-t-il grandement influencé le travail d’Oldham. J’imagine très bien Oldham s’identifier au côté « contestataire » du vétéran. Dans un passé pas si lointain, Bonnie Prince Billy aimait bien prendre, lui aussi, un gros coup de temps à autre. En 2003, ceux qui l’avaient vu sur scène en première partie de Björk au parc Jean-Drapeau avaient pu le constater…

Pour louanger comme il se doit son idole, Oldham a fait appel à une formation nommée The Bonifide United Musicians et s’est adjoint les services de quelques instrumentistes réputés : Matt Sweeney (guitariste qui a joué avec Iggy Pop) et Emmett Kelly (The Cairo Gang), pour ne nommer que ceux-là. Les chansons ont toutes été enregistrées et arrangées au domicile d’Oldham.

Si la musique d’Haggard est pure et dure, l’interprétation qu’en fait Bonnie Prince Billy fait le pont entre la musique country et ce genre fourre-tout que l’on nomme Americana. Le songwriter ne modifie d’aucune façon les structures composées par Haggard, mais le folk assumé, ponctué parfois de cuivres et de flûte traversière, adoucit les intentions primaires de son héros. Pas nécessairement une bonne chose, car, à mon humble avis, Oldham est au mieux quand il gémit sa souffrance sans aucune censure, quand il incarne le parfait loser accoudé à un bar de quartier depuis des heures.

Néanmoins, certains pourraient peut-être apprécier la sensibilité empreinte d’admiration que Bonnie Prince Billy insuffle à tous ces classiques parus entre 1967 et 2011. Bref, Best Troubadour est intéressant, pour celui qui est féru d’histoire de la musique country américaine (dont Haggard constitue l’un de ses indéfectibles piliers), mais c’est loin d’être transcendant, comme si Oldham était trop impressionné par l’œuvre de son idole pour prendre des risques notables.

Il y a bien quelques chansons, ici et là, qui font leur bout de chemin, mais ce n’est pas assez pour que j’ai eu envie d’y revenir. L’interprétation classique de The Fugitive rappelle à quel point Haggard était un singulier « bummeux »; une superbe chanson de fuite et d’excès. Le « shuffle » entendu dans Haggard (Like I’ve Never Been Before) est parfaitement réussi et le penchant jazzistique de I Always Get Lucky With You est amusant, sans plus.

Pas un mauvais disque que ce Best Troubadour, mais ce n’est rien pour écrire à sa mère. Mais bon, dans cette époque où tout ce qui n’est pas « jeune », « in » et « technologique » est considéré comme ringard ou réactionnaire, les nouvelles moutures des classiques d’Haggard méritent d’être entendues. Et s’il y a un artiste dont la mémoire devrait être perpétuée éternellement, c’est bien celle de Merle Haggard.

Ma note: 6/10

Bonnie Prince Billy
Best Troubadour
Drag City
57 minutes

http://www.dragcity.com/artists/bonnie-prince-billy

https://bonnieprincebilly.bandcamp.com/album/best-troubador

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