Battles
Juice Crypts B
- Warp Records
- 2019
- 41 minutes
4 années se sont écoulées depuis la dernière offrande des New-Yorkais de Battles. La Di Da Di était un voyage uniquement instrumental des plus réussi dans leur univers à la complexité kaléidoscopique de prog-pop électronique. Énorme changement pour Juice Crypts B, le guitariste Dave Konopka a quitté le navire. Ne reste que Ian Williams avec son fidèle séquenceur, ses synthés et sa guitare pour accompagner John Stanier qui se démène comme diable derrière sa batterie. Ça donne le projet le plus épuré (un terme que je ne pensais jamais associé à leur musique) de Battles depuis Mirrored. Sans Konopka, le duo doit suer encore plus que d’habitude, mais ça semble les obliger à travailler avec moins d’effets, de boucles et de distorsion.
Depuis 2003, le groupe a donc perdu la moitié de ses membres. Ça avait commencé avec le départ de Tyundai Baxton en 2010 et de sa voix d’extraterrestre auto-tuné. Le groupe avait d’ailleurs eu de la misère à retrouver un partenaire vocal pouvant compléter adéquatement les compositions déjà si expressives de Gloss Drop en 2011. En 2019, l’expérience semble avoir porté ses fruits parce que les pièces collaboratives sont les moments forts de cette galette. Une belle découverte avec la voix puissante de Xenia Rubios (They Played It Twice), un succès instantané avec Sal Principato (Titanium 2 Step) et un doublé avec Tune-Yards (Last Supper On Shasta Pt.1 & 2). Sans les imiter platement, on entend en quelque sorte des réinterprétations de ce que je croyais être les inimitables prestations de Baxton.
Pour accompagner leurs invités, le duo démontre encore leur ingéniosité à mélanger sans effort des séquences électroniques à leur performance en direct. Les sonorités inimitables de la guitare (Fort Greene Park) ou du clavier (Ambulance) de Williams sont encore au rendez-vous. Imaginez-vous des notes écrasées par deux tonnes d’effets. Des couinements parfois agressants, mais qui finissent presque toujours par vous obséder.
Comme tous les albums du groupe, les enregistrements sont d’une qualité maniaque. Chaque détail est d’une clarté impressionnante. Fermez les yeux et écoutez A Loop So Nice…, les sons scintilleront dans vos paupières. Un moment de contemplation envoûtant qu’il fait bon de se rappeler à l’écoute du maillon faible de l’album : Sugar Foot. À la première écoute, les 2 dernières minutes de cette pièce plantaire étaient presque insoutenables. Une cacophonie étourdissante. Sur le reste de la galette, Stanier est toujours aussi explosif avec ses tambours pour donner aux compositions une bonne dose d’imprévisibilité. Mais avec Sugar Foot c’est la saturation jusqu’à l’écœurement plutôt que l’envoûtement. Heureusement, ça s’améliore à chaque nouvelle écoute.
Après quelques écoutes, Juice Crypts B est une proposition plus décontractée qu’à l’habitude, confirmant que la musique de Battles peut être profondément amusante. Parfois cryptique, qui combine des passages survoltés à des moments contemplatifs, voilà un album avec des idées fascinantes.