En tournée nord-américaine, la formation culte nipponne Kodo était pour un soir seulement dans la métropole, le jeudi 16 mars dernier. Entre les murs de la Salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts, les vibrations émanaient depuis l’Eden insulaire jusqu’à l’auditoire en transe terrestre, face à une telle performance alliant chants, danses et percussions organiques.

Vertiges du tambour japonais

La création intitulée Tsuzumi se déploie par une succession de tableaux scéniques. Un feu roulant de mises en scène à couper le souffle, mené par le directeur de la troupe Yuichiro Funabashi, durant plus de deux heures. Pour souligner en grande pompe la genèse des artistes de Kodo depuis quatre décennies, les corps tambourinaient avec une justesse poétique hors de ce monde. Comme une osmose plus que parfaite entre ces femmes et hommes de toute génération, incarnant la perfection de l’art de manier le « taiko », traduction en japonais du mot  « tambour ». Parfois à quatre, puis à douze, ces virtuoses surpassent les vertus humaines de la percussion, pour élever les rites à la glorieuse consécration. L’agilité suprême de battre la peau des tambours dans une grâce telle semant l’émoi et l’admiration divine.

Tsuzumi résonne et vibre aussi par des chants aériens, au féminin comme au masculin. Tonique, voire athlétique, souvent en positions sollicitant une endurance extrême face à des tambours colossaux, la troupe émerveille par son extrême sens du détail et du geste, faisant vibrer les tympans et l’âme tout entiers. Manifestations propres à l’effet taiko qui, au pays du Soleil-Levant, constitue l’organe du cœur à la cadence idéale de la sensation de vivre. Nulle célébration ne pourrait s’y soustraire là-bas, et l’on perçoit humblement l’ampleur de sa fonction cosmogonique, en tout abandon. Primeur de la soirée, la création Duy-Ha, préservée dans son écrin depuis 15 ans, et la consécration d’œuvres aux épithètes épiques : O-daiko, Yatai-bayashi et Zoku.