Concerts

French New Wave Week #5 : Ian Caufield, P.R2B, Arthur Ely, Pomme et Météo Mirage.

Ce soir, la façade monolithique de La Sirène, c’est les portes de l’Atlantide. La salle accueille la deuxième soirée de la French New Wave Week #5. Qui porte bien son nom (déjà, parce que c’est la cinquième édition), mais aussi, et surtout,parce qu’elle nous fait bel et bien découvrir cette nouvelle scène française rutilante et bigarrée. Une scène qui ne s’encombre pas de codes superflus, brise les frontières entre les styles et ose les mélanges.

C’est le rémois Ian Caulfield qui ouvre le bal dans la plus petite salle, baptisée Club. Armé de sa guitare et accompagné d’un batteur, il commence sans sommation. Le chant est ample et assuré.Il fait honneur à la langue française avec ses textes simples et poétiques. Sorte de croisement entre Mac DeMarco et Marty McFly, il arbore un bonnet enfoncé sur de longs cheveux de surfeur californien. Il plaque quelques accords ou égrène un arpège sur son instrument. Puis il interprète son morceau, Pas grand-chose, à l’ambiance entêtante et cinématographique. On remarque aussi la très jolie chanson, J’ai besoin d’elle. Plus tard, sur le titre Tu me manques, il joue de connivence avec son batteur, légèrement penché au-dessus de son kit, avant de décocher un solo de guitare plein de suspens, que n’aurait pas renié Sergio Leone.

Nous filons voir P.R2B dans la grande salle, située juste au-dessus. La chanteuse distille un mélange de chanson, de rap, de jazz, et même de classique. Forte d’une réelle présence scénique, elle captive lorsqu’elle se contorsionne et exécute des pas de danse épileptiques. Océan Forever, titre pop-synthétique 80’s au refrain accrocheur (et paru sur la compilation de La souterraine), obtient l’approbation du public. Elle aussi est maîtresse de sa voix et semble avoir un goût pour le vrai chant (et pas d’un parlé-chanté paresseux), qu’elle alterne avec des passages rappés. Sur une boucle d’orgue lugubre et un gros beat house binaire, son débit, saccadé et précis, rappelle celui du début des années 90 (décidément, cette décennie est partout). Ses trois musiciens, tout de noir vêtus, l’accompagnent avec maestria. Elle prend sa clarinette pour un passage presque free jazz, où elle échange les chorus avec son saxophoniste. Ce dernier joue des passages volontairement faux (on dit tout quand c’est fait exprès). On retient aussi, La chanson du bal, histoire d’amour noctambule au texte finement ciselé.

Retour dans la salle Club pour le passage d’Arthur Ely. Le Strasbourgeois à la chevelure acrobatique est vêtu d’un T-shirt affichant le message Tierra y Libertad. Seul avec sa guitare électrique et des instruments qu’il déclenche au besoin, le chanteur nous propose une musique hybride, qui chronique sans filtres, ses frustrations et ses angoisses adolescentes. Pas d’Auto-tune ici et une troisième mention très bien pour le chant. Quelques crescendos maîtrisés happent la foule. Entre chaque morceau, il étire un fil imaginaire en nous contant les aventures d’un jeune homme, dont l’errance lui permet de trouver la liberté. Ses solos de guitare, au son sale, mais aussi mélodieux et saisissant, complètent bien le propos. Cela manque tout de même d’un groupe, qui lui ferait justice. À suivre donc. Quelques titres à écouter : À raison ou à tort, Le dernier homme, Libre.

22h45, c’est au tour de Pomme d’investir la grande scène. Tête d’affiche de la soirée, la jeune Lyonnaise, que l’on interviewait plus tôt dans la journée (restez attentif ça arrive), rode actuellement un nouveau format de spectacle. Elle est accompagnée de deux musiciennes. Une batteuse et une bassiste/claviériste. Ce changement apporte une épaisseur nouvelle à ses morceaux qui, s’ils sont tout à fait cohérents de façon dépouillée, prennent ici une dimension électro, intéressante et plus dansante. La foule, compacte, est amassée jusqu’au fond de la salle. Pomme entame son show avec une petite blagounette qui amuse l’assistance. Puis lance le titre Anxiété, porté par un riff de clavier lancinant et son chant sobre, mais habité. Plus loin, elle s’adonne à deux reprises à l’exercice de l’adaptation, comme le faisaient les artistes français des années 60. Elle chante une réinterprétation de Jolene de Dolly Parton,qu’elle baptise Pauline. Puis une traduction efficace de Bad Guy de Billie Eilish, traduite par Le méchant.

La jeune artiste,un peu Bonnie Parker, un peu Edith Piaf, et forcément beaucoup Pomme, affiche sur scène une force tranquille. Elle interprète la vibrante, Ceux qui rêvent,à l’unisson avec ses deux partenaires. Puis arrive l’heure du rappel, qu’elle négocie d’avance avec le public. On retient Soleil Soleil, soutenue par des gros accords de guitare frappés et portée par un thème captivant en falsetto.

Dernière descente dans la salle Club pour le passage de Météo Mirage, quintette rock presque classique au regard des décoctions musicales que l’on entendait ce soir. Il joue un rock synthétique trempé dans la cold wave, (un peu à l’image des Film Noir), puis mâtiné d’électro. Leur musique est d’une froideur éthérée, qui rappelle les Américains d’Interpol,mais aussi hypnotique et accrocheuse.

Les musiciens se lancent parfois dans de longues répétitions obsédantes d’un thème. Ils arborent ce look que tous les groupes de rock actuels ont piqué au Alex Turner de Tranquility Base Hotel & Casino : à savoir, costume trop large sorti des 80’s de Miami Vice (ou de la décennie précédente, ça varie) et cheveux jusqu’aux épaules, façon Adrian Paul dans la série Highlander, des 90’s. Le chanteur-guitariste partage le lead avec un autre vocaliste et le groupe maîtrise l’art des harmonies vocales. Si leur musique se veut assez planante et un tantinet psychédélique, leur set n’est pas exempt de morceaux dansants avec des rythmiques de batterie syncopées.Les titres à écouter : De l’amour à la haine, Pacifique, Le vide.

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