Concerts

FIJM 2017: Tanya Tagaq

En ce chaud vendredi soir de juillet, les mélomanes avaient la chance de voir Tanya Tagaq au Club Soda dans le cadre du Festival International de Jazz de Montréal. Récit d’une soirée qui n’a pas laissé les spectateurs sur leur faim.

Une Tagaq aussi fragile que forte

Les lumières du Club Soda se sont tamisées pour l’arrivée d’un impressionnant chœur d’environ 30 chanteurs. Puis, ce sont les musiciens et la chef de chœur qui ont pris place sur scène avant de voir l’arrivée de Tagaq. Tous étaient vêtus de noir. À travers la sobriété, la robe de Tagaq et les cheveux de la chef de chœur, tous les deux rouges vifs, ressortaient du lot. Une sorte de lumière à travers la noirceur ambiante. La chanteuse inuite a pris le micro pour nous saluer de sa petite voix timide. Elle enlève ses chaussures et nous explique qu’ils sont faits de peau de phoques. Puis, elle nous explique qu’elle ne voit pas la différence entre la peau de phoque et le cuir alors que tout le monde en porte. Puis, elle nous présente vivement les différents musiciens et chanteurs sur scène. On retrouve à ses côtés son fidèle acolyte Jesse Zubov et son violon magnifique. Elle nous explique aussi que la prestation à venir est une improvisation à partir de son plus récent album nommé Retribution.

Benoit Rousseau / Festival International de Jazz de Montréal

Une longue rivière d’émotions et de sons

Pendant une heure, Tanya Tagaq a donné tout d’elle-même. Dans un long fleuve de sonorités, Tagaq nous a menés de sa main de maître prenant des élans immenses pour arriver à des climax percutants. À chaque fois, elle laissait la poussière retombée un tout petit peu avant de nous mener une fois de plus en voyage. Sa générosité et la particularité de ce qu’elle crée ont toutes deux participé à rendre cette expérience mémorable et unique. Lorsqu’elle nous chante des basses, on le ressent dans le plexus solaire, même au deuxième étage. Ses rythmes vocaux ancestraux se rapprochent de la musique psychédélique. Le public silencieux comme je l’ai rarement vu était obnubilé par la Canadienne.

Souvent pendant le spectacle, Tagaq est passé rapidement de ces graves qui évoquent la viscéralité animale, pour plonger dans des aigües fragiles et percutantes. Pendant le spectacle, on ressent le besoin de se laisser aller à ses chants envoutants. J’ai rapidement maudit la disposition assise de la salle. Nous aurions dû être debout, à la même hauteur que la chanteuse, parce que son art se vit en communion et que la proximité nous aurait grandement aidés à plonger plus profondément dans son univers. Elle a passé à travers une bonne partie de l’album offrant même un court passage de sa reprise de Rape Me de Nirvana. Pris dans un contexte de la situation des femmes autochtones, cette chanson écrite par Kurt Cobain, prend une dimension encore plus puissante.

Benoit Rousseau / Festival International de Jazz de Montréal

Mission accomplie

L’ovation debout a duré de longues minutes après la dernière note poussée par Tagaq. Les lumières du Club Soda avaient beau être ouvertes, les claquements de mains ne cessaient point. Lorsqu’elle a mis les pieds sur scène, un drapeau inuit (ou Inuk) a été montré au balcon. N’en fallait pas plus pour qu’elle éclate de joie. Parmi les spectateurs se trouvaient deux chanteuses de gorge qui sont venues faire le rappel avec elle sur scène en format : combat des poumons. La joie se lisait sur le visage de Tagaq qui avait devant elle deux autres artistes qui partageaient son amour pour cette forme ancienne de chant. Encore une fois, même sans vraiment avoir entendu Tagaq chanter, les applaudissements chaleureux de la foule ont accompagné Tagaq vers la sortie.

On peut décidément dire : Mission accomplie.

http://www.montrealjazzfest.com/

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