Concerts

Festival en chanson de Petite-Vallée 2023 | Jour 5 : Philippe B et La Marée de l’aube

J’en suis déjà à la cinquième et avant-dernière journée de couverture du Festival en chanson de Petite-Vallée. Même si la fatigue commence à se faire sentir, le plaisir d’aller voir des concerts, lui, demeure intact.

Hier, j’ai passé un agréable après-midi en mode folk avec Philippe B et, en soirée, j’ai assisté au deuxième spectacle-thématique du festival, La Marée de l’aube. Ce concert collectif mettait en vedette Vincent Vallières et son groupe, l’auteur-compositeur Dumas ainsi que les artistes autochtones Natasha Kanapé, Kanen et Sandrine Masse.

Credit photo : Alexandre Cotton

À l’église avec Philippe B

S’il y a un long format québécois qui devrait probablement se frayer une place dans notre liste annuelle des meilleurs crus de l’année en cours, c’est bien ce Nouvelle Administration de Philippe B. Mon collègue Bruno Coulombe en a fait une excellente critique dans ces pages.

C’est donc dans la magnifique église de Grande-Vallée qu’on pouvait entendre les chansons à la fois simples et grandioses de cet auteur-compositeur de grand talent. Accompagné par la guitariste Marie Claudel et la claviériste Ariane Bisson McLernon, le Rouynorandien d’origine a entamé sa prestation avec la chanson-titre de son plus récent album, suivie d’une superbe version d’Hypnagogie bonifiée par les claviers orchestraux de Bisson McLernon.

Même si au début du spectacle la voix de Philippe B manquait un peu de justesse, les petites ritournelles de ce chansonnier sont tellement bien ficelées qu’on a aisément oublié ces inflexions vocales inharmonieuses. L’une des forces qui caractérisent le travail de l’artiste est sans contredit l’espace qu’il accorde aux silences. Loin d’être un auteur verbeux, Philippe B va toujours à l’essentiel, et dans ses textes, et dans sa musique, évitant ainsi toute esbroufe technique inutile. Et l’homme présente toujours ses chansons avec moult détails à la fois pertinents et amusants.

Parmi les bons moments? J’ai noté la relecture réussie de Je t’attends; morceau introductif de Nouvelle Administration. Il nous a également offert California Girl, dont la mouture proposée est inspirée directement d’une version remaniée dans le cadre d’une émission animée par Louis-Jean Cormier intitulée Microphone; émission présentée il y a quelques années à l’antenne de Télé-Québec. C’est la version conçue spécifiquement pour ce show télé que Philippe B a conservé intact.

Et le concert s’est conclu avec Petite leçon de ténèbres, pièce-phare parue sur l’album Variations fantômes (2011). En rappel, le troubadour nous a offert la chanson la plus lente de son répertoire — du moins, selon ses dires — L’amour est un fantôme.

Philippe B nous a offert un moment folk, simple et agréable, dans un lieu parfaitement conçu pour ses chansons intimistes.

Credit photo : André Bujold

Une Marée de l’aube essentielle et émouvante

J’ai aussi assisté au deuxième concert-thématique du festival : La Marée de l’aube. Mise en scène cette fois-ci par Alexia Bürger, le spectacle réunissait des artistes allochtones et autochtones; une démarche noble et essentielle, s’il en est une. Le symbole de l’aube, lui, est une référence à cette nouvelle ère d’ouverture et de collaboration entre les différentes nations autochtones et le peuple québécois que l’on voit poindre lentement, mais sûrement. Et il était grandement temps !

C’est Vincent Vallières qui a amorcé la prestation avec une version rassembleuse d’Avec toi, pièce tirée de l’album Fabriquer l’aube (2013). Cette relecture mettait de l’avant les indéniables compétences du groupe qui l’accompagne. Durant cette chanson, la formation avait des airs de Wilco lorsque la bande à Jeff Tweedy est en mode folk country.

Ensuite, c’est la délicate sensibilité de l’autrice-compositrice Kanen qui m’a conquis. En duo avec Vincent Vallières pour l’excellente Nimueshtaten Nete et en compagnie de Natasha Kanapé pour Assi, — deux pièces extraites de l’album Mitshuap —, l’artiste originaire de Uashat-Maliotenam m’a particulièrement impressionné par son interprétation juste et nuancée.

La Marée de l’aube a été créée autour des textes des auteurs-compositeurs participant au spectacle. Or, en milieu de parcours, j’ai noté une sorte de temps mort, particulièrement durant cette intense, mais nécessaire, déclamation de la part de Natasha Kanapé. Et c’est sans compter sur l’arrivée trop discrète de la « chansonneure » Sandrine Masse qui aurait mérité un peu plus de lumière.

Si le choix littéraire des chansons était plus qu’approprié, ce fut parfois au détriment de la cohérence des genres musicaux. Cela dit, c’est l’habituel dynamisme de Dumas qui a redonné un peu de tonus à ce concert avec Mouvement, chanson extraite de son tout dernier opus, Cosmologie (2023).

Cette Marée de l’aube s’est conclue avec une interprétation collective, et hautement émotionnelle, d’une pièce de Vincent Vallières, Chanson de la dernière chance, tirée à nouveau du long format Fabriquer l’aube.

Enfin, il est impossible pour moi de ne pas souligner la performance étincelante des musiciens qui ont magnifiquement soutenu musicalement les Vallières, Dumas, Kanen, Natasha Kanapé et Sandrine Masse. Coup de chapeau bien senti au jeu nuancé d’André Papanicolaou à la guitare, au batteur-métronome Simon Blouin, à la basse bien ronde de Michel-Olivier Gasse et aux superbes claviers aériens de Sheenah Ko. Tout ce beau monde fut habilement dirigé par Amélie Mandeville, directrice musicale du spectacle.

Ce fut une Marée de l’aube émouvante, comme il se doit, mais surtout essentielle au rapprochement de nos deux cultures.

La carte postale du jour :

Aujourd’hui, mon coup de cœur touristique va à la petite église de Grande-Vallée, là où avait lieu la prestation de Philippe B. Décorée pour l’occasion de banderoles rouges et dorées parfaitement cohérentes avec les couleurs dominantes de l’identité visuelle du festival, on peut également y admirer un magnifique jubé situé tout juste en face de l’autel.

Derrière l’autel, vous pouvez poser votre regard sur une grande statue qui personnifie une sorte de prêtre catholique ressemblant étrangement à Jésus, du moins c’est l’analyse assez sommaire qu’en a fait ma partenaire de voyage. Peu importe si vous êtes passionnés ou pas par « le Nazaréen » et son histoire, l’endroit, lui, vaut le détour.

L’église est sise sur une colline permettant d’admirer le golfe Saint-Laurent dans toute sa splendeur. Bref, c’est un bel endroit à visiter si vous passez par Grande-Vallée.

Crédit photo: Alexandre Cotton

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