Bourse RIDEAU 2018 : une virée courte, mais sympathique
Chaque année, la bourse RIDEAU est comme le dit si bien Keith Kouna : la grande foire du spectacle. Grosso modo, c’est l’occasion pour les diffuseurs de la province de venir voir ce qui se trame sur les différentes scènes de la province. Au menu? Du théâtre, de la danse et bien sûr de la musique! Ce n’est jamais un environnement idéal pour un mélomane parce qu’on n’a que des 20 minutes qui s’enchaînent rapidement. Par contre, ça permet d’en apprendre un peu plus sur les musiciens qu’on couvre à l’année. C’est un public particulier qu’il faut savoir apprivoiser. Pendant que je passais à Québec, j’ai eu le temps de voir quelques vitrines. En voici les résumés :
Corps Amour Anarchie | Léo Ferré
Le concept en soi du spectacle est très intéressant. Reprendre les fameux mots de Léo Ferré pour en faire un spectacle multidisciplinaire qui mélange chant et danse contemporaine. Pour cet extrait, c’est Alexis Dumais, Alexandre Désilets et Bïa qui étaient représentants en musique. Trois danseurs accompagnaient le trio pour l’occasion. C’est traitre, car 20 minutes ce n’est pas très long. Parfois émouvant, l’extrait avait aussi tendance à tomber dans la contemplation des mots de Ferré. Le problème, c’est que ça tue toute la vie intense, parfois vulgaire et la puissance de ceux-ci. Comme bien des hommages, il y a le danger d’oublier toute la richesse de la vie de ces œuvres qui ne sont pas figées dans le temps, mais qui sont encore gorgées de vie. La bande a tout de même réussi par moment à redonner la grandeur qui revient aux mots de Ferré.
Lucioles
Lucioles est un collectif regroupé autour du pianiste Guillaume Arsenault comptant dans ses rangs des musiciens de haut calibre comme Robbie Kuster (Patrick Watson) et Erika Angell (Thus : Owls). Simplement pour voir Kuster jouer de la batterie, ça vaut déjà la peine. Le collectif fait de la musique instrumentale avec une approche néo-classique avec de gros traits pop et quelques influences de musique des Balkans. C’est intéressant, surtout que musicalement, c’est assez complet avec 8 musiciens sur scène.
Elisapie Isaac
La chanteuse Elisapie Isaac est venue nous présenter quelques extraits de son album à paraître chez Bonsound cette année… et nous jaser ça! Sur les 20 minutes, elle a dû nous parler 10 minutes. On l’excuse, elle est fort sympathique et pertinente. Elle était entourée de son fidèle collaborateur Joe Grass et les trois chansons qu’elle a proposées étaient intéressantes. Parmi celles-ci se trouvait une reprise de Willie Thrasher, un musicien inuit qui a défendu pendant longtemps les droits autochtones. On a bien hâte d’en entendre un peu plus!
Julie Aubé
La jeune néo-brunswickoise a lancé l’appréciable Joie de vivre à l’automne. On peut dire une chose, ses pièces sont impeccablement reprises sur scène. Si ce n’était du son dérangeant du bassiste qui était à la fois mal balancé et possédait un drôle de ton pour l’ensemble, ça aurait été sans taches. Julie Aubé s’est présenté en vraie professionnelle et a chanté ses pièces avec un aplomb impressionnant. Elle a notamment interprété la pièce-titre de l’album qui était fort réussie.
Loud
On va s’entendre, il n’y a pas quand chose de plus anti-climatique pour un rappeur que de rimer devant des gens assis. Mais Loud avec sa candeur naturelle et son professionnalisme l’a fait avec brio. Son attitude a été efficace et à la fin de son spectacle plusieurs diffuseurs étaient debout de la scène. Ça se passe pour Loud et c’est loin d’être un vol. Il est solide sur scène et livre ses vers avec une habileté peu commune. Il nous a livré les gros morceaux dont Hell, What A View, Nouveaux riches, Devenir immortel (et puis mourir) et 56K.
Keith Kouna
Keith Kouna n’est pas facilement impressionnable, encore moins dans son fief. Il s’était mis chic pour l’occasion et armé d’une cravate, Kouna a livré les pièces de son excellent Bonsoir Shérif paru à l’automne. Les mots de Shérif, Vaches et Marie sont sortis avec une maîtrise exemplaire et une énergie contagieuse. Ceux qui dansaient quelques instants plus tôt sur les rythmes suaves de Loud étaient maintenant sur leurs pieds, cornes de diables dans les airs en sautillant sur les rythmes punk de Kouna. Une performance fort convaincante.
Une bourse comme celle-ci n’est vraiment pas le contexte idéal de voir des spectacles pour moi. Par contre, tout autour est intéressant et surtout l’approche que les musiciens prennent dans de telles situations est révélatrice de leur personnalité. C’était une belle petite virée dans un univers quasi parallèle fort plaisante!