Chroniques

Le sadcore

La première occurrence du sadcore apparaît au début des années 90 pour qualifier le son et l’état d’esprit de deux groupes Slint et Red House Painters. On dira de Spiderland en 91 qu’il correspond à cette étiquette de même que Red House Painters et son album homonyme, surnommé Rollercoasters, sorti deux ans plus tard.

On trouve chez les deux groupes une richesse mélodique qui côtoie des ambiances et des instrumentations austères et une prose recherchée, quoique cryptique. Eh oui, pour être triste et poignant, ces deux albums le sont.

Il faudra attendre à 2003 pour que le terme refasse surface. C’est le LA Weekly qui l’a popularisé en présentant une jeune Cat Power comme la reine du sadcore, alors qu’elle venait de lancer You Are Free.

Musicalement, le sadcore de Cat Power, très ancré dans l’americana et les protest songs des années 60, est assez loin des balbutiements post-rock de Red House Painters et de Slint, mais il est devenu le canevas du genre. Les Lana Del Rey, Elliott Smith, Sufjan Stevens (époque Chicago) de ce monde cadrent bien avec l’état d’esprit de la Chan Marshall de 2003 qui n’avait même pas encore commencé à plancher sur The Greatest, un album qui cadre encore plus à l’étiquette, il me semble.

Le sadcore a aussi été un mouvement underground de la deuxième moitié des années 90 dans la région de Boston, à Washington et à Philadelphie. Et c’est seulement dans ce courant que le sadcore exploite sa racine dite « core ». Des groupes comme Converge et Cave In sont peut-être finalement les plus illustres créateurs de sadcore même s’ils ne se sont jamais réclamés du terme.

C’est toutefois aujourd’hui dans la culture populaire que le sadcore brille. On le reconnaît par son « soft-mélodrame », son goût assumé pour ce qui est révolu et son filtre sépia mélodique. Et si ça marche assez bien pour définir le son de Cat Power, ça marche encore mieux pour Lana la mal-aimée. Que les deux femmes unissent leur voix sur une chanson rend le tout encore plus limpide.

Bref, c’est peut-être un brin stretché que de parler d’un style de musique pour le sadcore, hormis pour la branche du hardcore de la Nouvelle-Angleterre de la fin des 90’s. Mais à l’instar du normcore, où le côté radical du mouvement est en fait une posture ironique, on peut dire du sadcore qu’il est une affirmation de la tristesse comme exutoire et comme témoignage d’une urgence de vivre intensément, mais exprimé dans un refrain feutré.

Au final, ça, c’est leur genre, pis ça vaut la peine de pleurer là-dessus.

Genre : Sadcore

Artistes : Cat Power, Elliott Smith, Lana Del Rey, Bright Eyes, Slint, Low, Death Cab For Cutie

Origines : Red House Painters, Slint et un christi de paquet de bands hardocre post-Fugazi

Influences : nostalgie, désenchantement du monde, angoisse

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