Productions Totem Contemporain
Totem Électrique II
- Kohlenstoff Records
- 2016
- 57 minutes
Productions Totem Contemporain n’est pas un projet, mais plutôt un organisme fondé en 2003 par le compositeur Jean-François Laporte. Inventeur de plusieurs instruments aux attributs électroacoustiques, Laporte a créé la série Totem Électrique afin de permettre à des compositeurs invités d’explorer et faire vivre ces instruments. C’est dans cet ordre d’idée que l’étiquette Kohlenstoff a publié Totem Électrique II en février, et ainsi documenter le fruit de ces rencontres. On s’en doute, la forme musicale a plus à voir avec des vibrations et des oscillations, générées le plus souvent de façon analogique, et traitées savamment de façon numérique.
Line Katcho inaugure l’album avec sa pièce Corps de brume. Combinant L’Orgue à sirènes de Laporte et des traitements en temps réel, Katcho nous amène quelque part entre le concret et l’abstrait, entre la vibration des cuivres et l’oscillation des circuits électroniques. La rencontre entre les deux est géniale; épurée au début, elle se complexifie à mi-chemin avec les grésillements et les itérations.
Guillaume Cliche prend le relais avec sa pièce Bissectrice du cône, en utilisant cette fois-ci Le Bol. Le principe est sensiblement le même, mais la relation avec la matière est plus directe, on sent l’élasticité de la membrane et l’impact de l’air comprimé. Ça s’étire et se tortille à travers des algorithmes numériques et s’évanouit après un dernier souffle.
L’Orgue à sirènes est revisité cette fois-ci par Maxime McKinley et sa pièce À son insu. Pas mal strident au début, les hautes fréquences se croisent ensuite au-dessous de percussions métalliques et échantillons inversés. La basse entre à un certain point, et tout ce qui semblait s’éparpiller ici et là se réunit en une grande respiration lente, gracieuse et méditative.
Vent solaire, quatrième pièce composée par Jean-François Blouin pour la Table de Babel, débute avec intensité et densité; une multitude de strates allant de la vibration pure à la contorsion métallique créent une atmosphère s’apparentant à un écrasement de paquebot. Le deuxième devient plus aérien, comme des lames criantes, et ça redescend ensuite dans le ventre de la bête, l’oreille collée contre le moteur.
Maxime Corbeil-Perron conclut le disque avec sa pièce Vertiges, et une troisième rencontre avec l’Orgue de sirènes de Laporte. Le début de la pièce se déploie comme une vague d’échantillons sur une autoroute. Collision et puis silence. Les dissonances scintillantes sont suivies de ponctuations défragmentées, la forme se densifie jusqu’à l’explosion de cuivres, et se termine comme une tornade qui s’éloigne.
Totem Électrique II témoigne d’un génie musical qui va de la conception d’instruments à la mise en scène de ceux-ci par des compositeurs complices. Le projet semble ambitieux au départ, mais une fois que l’on apprivoise la démarche, un monde fascinant s’ouvre à nos oreilles, et donne tout simplement envie de jouer de ces instruments. À quand un Bol dans chaque école primaire?
Ma note: 8/10
Productions Totem Contemporain
Totem Électrique II
Kohlenstoff
57 minutes
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