Émile Bilodeau roule sa bosse depuis un bon dix ans alors qu’il faisait la finale des Francouvertes. Depuis, il a lancé 5 albums, fait le tour du Québec, traversé en France et a appris l’innu-aimun. S’il y a une chose qui n’a jamais failli, ce sont les convictions qu’il injecte dans ses chansons. Au cours des dernières années, Bilodeau a aussi fait son chemin en tant que troubadour en solo en concert. Il l’avait fait déjà sur Tout seul comme un grand en 2022. On pouvait mettre le tout sur le dos de la pandémie, mais, trois ans plus tard, voici qu’Émile Bilodeau présente un album non seulement en solo, mais aussi enregistré live aux Îles-de-la-Madeleine.

Contrairement à bien des albums live, Émile Bilodeau ne reprend pas son répertoire, à l’exception de Ça va qui devient Mauat Sham, chantée en innu-aimun, en duo avec Matiu. Mais le reste des pièces sont de nouvelles créations que l’auteur-compositeur-interprète a composées en plein mois de février aux Îles-de-la-Madeleine, à Havre-Aubert, pour être plus précis. Sur l’Île de la Grave en face de l’anse de Bassin, Émile Bilodeau a usé au maximum de la quiétude de l’hiver madelinot pour écrire des chansons qui poursuivent dans la veine qu’il creuse depuis le début de sa carrière.

Tant qu’à avoir écrit aux Îles, aussi bien l’enregistré là-bas aussi! On le retrouve sur scène dans la galerie-spectacle des Pas Perdus à Cap-Aux-Meules où le public, probablement attablé avec une Écume bien froide, a applaudi Émile Bilodeau, qui a présenté ses nouvelles créations au cours de deux concerts. L’histoire d’amour entre Bilodeau et les Îles est d’abord celle d’une femme, Flavie, qu’il nomme dès les premières lignes de Carte postale, une sorte de présentation de ce lien qui s’est créé avec l’archipel acadien. Une chanson d’amour qui ne ferme pas les yeux sur les difficultés des relations à distance, incluant quelques blagues typiques du jeune homme.

La critique sociale d’Émile Bilodeau n’est pas évacuée, mais on sent que la sagesse tranquillement fait son chemin. Faire la paix est un bon exemple alors qu’il ressasse les choses qui ne vont pas avec le monde, selon lui. On l’entend aussi dans la mélancolique Militer. Mais la sagesse, on la sent surtout sur Check-list et Crois-moi, deux chansons efficaces. La seconde est particulièrement touchante alors que Bilodeau s’ouvre sur des constats plus sombres. L’espoir n’y est pas absent totalement, mais on sent le poids du temps.

Musicalement, Émile Bilodeau ne réinvente pas la roue alors qu’il est seul à la guitare avec un pied qui frappe une tambourine au besoin. Par contre, il démontre une fois de plus son adresse pour livrer un bon concert. S’il y a une chose qui est toujours impressionnante, c’est bien le charisme irrésistible de l’auteur-compositeur-interprète.

Bill aux Îles ne réinvente pas la roue et ne nous envoie pas dans une nouvelle direction dans l’œuvre d’Émile Bilodeau. Par contre, c’est une collection franchement efficace de chansons qui s’écoutent bien et qui sont touchantes à plusieurs occasions.