Un peu de rattrapage. En mars dernier, Deafheaven lançait Lonely People with Power, son sixième album. Après une suite d’excellents albums en début de carrière, la formation prenait au cours des deux derniers albums de plus en plus une tangente shoegaze, délaissant la brutalité du black métal qui a marqué l’excellente Sunbather. Sur Lonely People with Power, la formation américaine revient à ses racines avec un black métal qui refuse les clichés et mise sur de bonnes mélodies.

Magnolia, le premier extrait à paraître de l’album, pointait déjà dans cette direction alors que la batterie était hyperactive et que la guitare était brutale et bruyante. Sur le tout, George Clarke est de retour à une voix gutturale héritière des grands groupes du genre. Le plus intéressant, c’est que ce retour au black métal ne semble pas forcé du tout. C’est plutôt comme si Deafheaven revenait dans les pantoufles pas du tout relaxantes qui ont fait sa renommée. Ceux qui s’énervaient au moment de beauté à travers leur création seront une fois de plus fâchés d’apprendre que leur goût pour celle-ci est encore très présent.

I’m bringing them bile
I’m clearing desires
Coins on their eyes
I’m clipping the flowers
Of spiritless leaders
Oh, they tremble in towers
Lonely people with power
Devoured by God
— Revelator

Ce n’est pas la seule pièce qui plonge à fond dans le black métal. L’excellente Revelator est puissante et puise dans des émotions brutes qui dénoncent les abus d’une partie de la société. C’est délicieux. Body Behavior qui la suit est tout aussi puissante, mais du côté plus mélodique de Deafheaven. On y trouve des moments d’apesanteurs musicaux qui sont les bienvenues dans la charge poignante qu’est Lonely People with Power.

Ce n’est pas le seul moment où la beauté de laquelle est capable le groupe fait surface. C’est aussi le cas au début de Heathen où Clarke chante même avec sa voix claire. Cela ne dure pas alors qu’à la marque d’une minute, le black métal fait à nouveau son retour en force. Mais le tout est une fois de plus très mélodieux. Deafheaven nous fait un autre coup de beauté grandiose avec Winona qui mise à la fois sur des élans grandioses et une mélodie lente et convaincante qui donne la même impression de grandeur qu’avec un orchestre.

Deux invités font leur apparition sur Lonely People with Power. Jae Matthews de Boy Harsher prête sa voix à la sombre Incidental II qui est du côté plus expérimental des créations de Deafheaven. Puis, Paul Banks pose sa voix sur Incidental III qui est aussi un moment de pause à travers les salves de l’album. Il lit un texte sur un motif qui mène vers Winona.

Un excellent record de Deafheaven qui offre ici une œuvre très près des sonorités de Sunbather. Si, comme moi, c’est votre album préféré de leur discographie, vous aurez ici aussi beaucoup de plaisir.