Mononc' Serge + Anonymus
Métal canadien-français
- Les productions Serge
- 2024
- 38 minutes
En 2023, Mononc’ Serge et Anonymus ont célébré les 20 ans de L’Académie du massacre, cette improbable rencontre entre le groupe métal et le barde à langue fourchue bien connu du Québec. Cette alliance peu orthodoxe avait d’abord eu lieu au festival Polliwog en 2001 lorsqu’Anonymus a rejoint Mononc’ Serge pour faire une version métal de Marijuana. Le tout a tellement fonctionné que les deux ont sorti deux albums : l’Académie du massacre en 2003 qui consistait en 5 nouvelles chansons et 9 reprises du répertoire de Serge Robert. Puis, Musique barbare, en 2008, était entièrement constitué de compositions originales. C’est le cas aussi pour Métal canadien-français.
Anonymus et Mononc’ Serge ont peut-être été surpris de l’engouement toujours très vif pour les projets communs des deux entités lors de leur tournée estivale en 2023. Un engouement qui tient alors que leur premier concert à Montréal s’est vendu comme des petits pains chauds et qu’un concert en juin pour les Francos a déjà été annoncé.
Mais parlons de l’album. Est-ce que c’est encore un peu nono tout ça? La réponse est : oui. Tout à fait. L’album commence par La ligue du vieux pouel, une chanson particulièrement thrash métal qui chante la délicate position d’être vieillissant et métalleux. Ce qui est doublement délicieux étant donné que… ben Anonymus et Mononc’ Serge ont commencé leurs carrières respectives dans les années 90 donc… disons que… sans vouloir faire de l’âgisme, ce n’est pas non plus une gang de vingtenaires. L’autodérision est particulièrement au menu quand Serge prend un ton doublement menaçant pour chanter : « quand t’es vieux pis que tu fais du métal / t’essayes d’avoir l’air méchant, mais t’as juste l’air cave ». Je vous rassure, Serge n’a pas l’air cave sur celle-ci. Ou encore sur Bilou bilou qui rit des métalleux qui aiment jouer très vite. Un message qui ressemble plus à Tipper Gore qu’à Mononc’ Serge.
Mononc’ Serge a encore de bonnes lignes sur Moé mais en mieux, une chanson qui chante les louanges de la cocaïne (de manière ironique bien sûr) avec des lignes telles que :
Quand y a de la poudre à pelle, tout est plus évident
Ça doit être ça qu’on appelle le privilège blanc
Parce que su’a poudre, c’est moé, mais en mieux
— Moi mais en mieux
Le groupe Anonymus n’est pas en reste et offre de beaux clins d’œil à plusieurs moments sur Métal canadiens-français. On retrouve un solo qui rappelle Iron Maiden sur La guerre de la technologie, cette chanson où Mononc’ Serge clame que les ordinateurs ont supplanté les bands. Sur Hommage aux hommages, le groupe glisse quelques notes de Sweet Child O’ Mine de Guns’N’Roses. En plus d’ajouter des clins d’œil à Harmonium dans les paroles.
Parmi les autres sujets qu’Anonymus et Mononc’ Serge maganent, on retrouve l’accent de nombreux québécois en anglais sur Shitty accent, la violence au hockey avec La bataille du Vendredi Saint ou encore la nouvelle année sur Bonne année.
Quand les Romains ont crucifié Jésus
Y s’est laissé faire comme un estie de minus
Mario Tremblay c’est pas de même qu’il aurait agi
Il leur aurait cassé le nez comme à Peter Šťastný
— La bataille du Vendredi Saint
Honnêtement, cet album est exactement ce qu’on peut attendre de l’union des deux artistes. Il ne faut pas prendre au premier degré les paroles qui sont livrées par Serge Robert qui continue de jouer les marges sur Métal canadien-français. Et musicalement, Anonymus est toujours aussi solide.