Concerts

MUTEK 2024 | A/Visions 2

Le programme de la deuxième soirée A/Visions proposait trois performances pratiquement à l’opposé de la veille, avec une trame sonore dénuée de distorsion et de saturation, et une atmosphère visuelle plus contemplative et méditative.

F E M I N A

L’artiste italien Riccardo Giovinetto ouvrait le programme avec F E M I N A, une performance audiovisuelle développée à partir de matières premières de la Renaissance. Dès les premières secondes de musique, une atmosphère de communion s’est imposée, en même temps qu’une qualité d’écoute très élevée, comme une messe du future dans le théâtre Maisonneuve.

Visuellement, il y avait l’équivalent d’aiguilles de sismographe placées en miroir à partir du centre, de sorte que deux images de la Renaissance étaient dessinées de chaque côté de l’écran. Le rendu laissait une impression d’imprimante à points mélangée avec un Lite Brite hi-tech, secondé par des variations de luminosité qui faisaient penser à des vitraux. Il y avait quelques longueurs marquées par des variations extrêmement subtiles, comme des écussons qui se désagrègent à la vitesse d’un sablier.

La trame sonore était superbement bien synchronisée à l’image, profitant de la précision chirurgicale du glitch pour sonoriser les aiguilles par exemple. La maîtrise de la technique du scrubbing sur les échantillons de chant madrigal ajoutait une strate mélodique très cool, passant d’une syllabe à l’autre en passant par les consonnes et les voyelles. Dans cet esprit, il y a eu quelques moments amusants qui se rapprochaient même du hoquet.

Martin Messier

Le temps d’installer les technologies avancées nécessaires à la performance, Martin Messier nous a présenté 1 drop 1000 years, œuvre immersive inspirée par la circulation thermohaline, dont le titre fait référence aux mille années requises pour qu’une goutte d’eau dans l’océan fasse le tour de la planète. Le phénomène planétaire était représenté par une installation ingénieuse de quinze filets d’eau secondé par autant de lampes et de stroboscopes.

Le débit d’eau, de la goutte au filet continu, combiné aux éclairages, générait un écran parfaitement synchronisé avec la musique. Dans ce contexte, l’œuvre a commencé simplement par une goutte d’eau agencée à une percussion, qui se dédouble en masse sonore et en nombre de filets, jusqu’à atteindre un certain momentum. Un long filet pour une note de basse monophonique, une suite de goutte pour une ligne de rythme minimaliste.

Le niveau de précision de l’installation était déjà très fascinant rendu là, Messier en a remis en activant les stroboscopes, combinés à un bruit de caméra vintage. L’effet de découverte scientifique fin dix-neuvième filmé par les frères Lumière a été instantané, le public hypnotisé par des gouttes d’eau qui flottent.

L’ajustement des fréquences entre les débits d’eau et les stroboscopes permettaient de les faire bouger vers le bas et le haut, créant une illusion de lévitation. La longueur des gouttes créait également une sorte de code morse séquencé à la musique, ajoutant un effet de flot contrôlé, comme des lignes de démarcations d’autoroute. Un chef-d’œuvre chaudement applaudi par un public conquis.

Murcof

Le mexicain Fernando Corona, alias Murcof, a conclu la soirée de façon assez relax avec une performance en direct du court métrage Twin Color, réalisé par Simon Geilfus. Au premier degré, l’œuvre s’étire sur une palette qui va de l’ambre au bleu, du coucher de soleil qui fait briller les champs jusqu’au sous-bois dans lequel s’éveille une entité nocturne.

Les visuels ont été entièrement créés comme un environnement de jeu vidéo en trois dimensions, avec des caméras programmées pour se déplacer comme sur des rails, générant des plans continus assez lents. En résumé, le soleil se couche pendant qu’une météorite se fragmente en plusieurs projectiles astraux qui terminent leur trajectoire dans la forêt. La séquence passe de l’explosion au feu, du sol brillant de tisons à une sorte d’énergie extra-terrestre qui se met à respirer. Hypnotisant.

La trame sonore est construite sur de la synthèse vaporeuse, et fait penser à une version pastorale de ce que Vangelis a imaginé pour Blade Runner. La fille du compositeur a également participé en chantonnant des notes très réverbérées, ajoutant une dimension de rêve d’enfant de la période vintage analogique. Une très belle conclusion à un magnifique programme de soirée.

Crédit photo: MUTEK

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