Entrevue | Jouer aux quilles avec P’tit Belliveau
C’est dans un salon de quilles un mardi après-midi près de la station Beaubien que Jonah Richard Guimond, alias P’tit Belliveau, s’est livré à une partie de questions qui n’attendait pas de résultat parfait.
Les règles du jeu de l’entrevue du 16 avril ont tourné autour de son nouvel album, de sa vision sur la musique et sur l’industrie qui la fait vivre ainsi que de ce qui s’anime pour lui cette année. P’tit Belliveau a aussi parlé de gobelins et de grenouilles, mais à ce sujet, ce n’était pas trop sérieux.
Beaucoup de gens ont assumé que les gobelins et les grenouilles ont une symbolique importante pour le musicien acadien, mais mis à part enrichir la part extravagante de son univers éclectique, nul besoin de pousser davantage la réflexion. À ce sujet donc, tout demeure dans le jeu, dans le divertissement. L’artiste avance simplement que, en ce qui concerne les deux créatures, « je m’associe avec des creepy crawly slimy little guys qui ont des green skins ». P’tit Belliveau rajoute : « sur ma propriété y’a un gros étang rempli de grenouilles, je les vois tout le temps, c’est mes seules friends, they’re the only ones that truly understand me ».
Après ça l’entrevue a tourné plus autour de la musique. Ça s’est poursuivi d’abord avec une question sur sa collaboration avec FouKi : « le texte de la chanson ou ce que la chanson parle about, le sens du texte, n’est pas vraiment sérieux, mais ça, c’est vrai avec beaucoup de mes chansons. But la musique est toujours sérieuse, moi pis FouKi, et, j’imagine, la plupart des musiciens, on prend la musique vraiment au sérieux. On adore la musique, on vit de ça, on vit avec ça, c’est dans nous autres ».
La musique sérieuse derrière la légèreté
Un peu plus tard, sur le même sujet, P’tit Belliveau a renchéri : « Quand moi et FouKi étions en studio pour faire cette chanson-là, on avait compris c’était quoi la chanson qu’on essayait de créer. Après ça c’est le travail sérieux de créer cette chanson-là, puis de production wise, achieve ce qu’on essayait de créer. Pour bien créer une chanson pas sérieuse, ça prend quand même beaucoup beaucoup d’heures de travail sérieux; avoir une idée du genre that would be a funny song, ça y est, on fait une chanson pour être bien pis comfy. Ça, ça prend 3 secondes, mais après c’est comme 100 heures pour tout le reste. Au final, c’est beaucoup plus sérieux quand on y pense comme ça ».
En demandant à P’tit Belliveau si son plus récent album, voire tous ses projets, est construit de cette manière, voici ce que le musicien a répondu : « Je ne pense jamais about anything, je ne pense jamais about si c’est sérieux ou si c’est pas sérieux. J’ai selon moi des chansons plus sérieuses, et j’en ai toujours eu, ou des moments, qui sont plus emotional ou plus raw ou whatever. J’ai des moments qui sont plus sillys pis off the wall. Pour moi, le plus qu’anything j’essaierais d’être honnête, avoir une présentation, un portrait honnête de moi-même pis de la vie à la Baie Sainte-Marie. Ça inclut toutes sortes d’émotions humaines, que ce soit le sillyness ou de pas se prendre au sérieux, ou que ce soit quelque chose d’émotif pis peut-être qu’on va pleurer pis refléter sur notre vie. Tout ça ça se mélange, pis le projet dans sa totalité je le prends au sérieux, but j’en suis pas nécessairement au point de dire que le produit final a besoin de refléter pis de poser des questions sérieuses ».
En poursuivant sur son processus créatif concernant le projet P’tit Belliveau, il a indiqué qu’il était toujours en train de faire de la musique: « All day long, j’en fais plein plein plein. De temps en temps, j’ai une chanson qui fit avec P’tit Belliveau. Je commence à créer une chanson, au début je suis comme : ça pourrait être une chanson à propos de ça, quasiment par hasard, pis après c’est de travailler naturellement. Donc si la chanson est comme ça, il faut faire ça et ça et ça. À la fin la seule chose que j’essaie de faire c’est des awesome chansons. Mon but c’est de créer de la musique qui permet aux gens d’escape pis de ne point penser à propos de la bullshit. Avec mon show pis avec ma musique, j’essaie d’apporter les gens ailleurs pis entertainer les gens; essayer d’offrir une alternative à la musique hyper sérieuse qui existe.
Le travail en solo
Outre FouKi, il n’y a pas d’autres collaborateurs sur ce nouvel album de P’tit Belliveau. Questionné à ce sujet, il répond: « j’aime beaucoup la collaboration, but je n’ai pas eu énormément d’occasions pour le faire encore. But je suis certainement intéressé d’en faire plus. Sur cet album-là, la seule raison pourquoi y’a un featuring, c’est parce que y’a juste une track qui fittait. C’est comme je disais, moi je n’essaie pas de m’imposer sur la chanson, j’essaie juste de logically suivre le fil de la chanson pis de faire en sorte que la chanson soit à mon goût. J’essaie de servir la chanson au lieu que la chanson me serve moi. Y’a juste un moment sur l’album où, niveau création, j’étais comme oh shit. J’avais déjà écrit les chorus de Comfy pis j’avais une idée pour les verses pis l’instrumental pis je me suis dit: Fouki would be perfect on this. Je ne crois vraiment pas au fait de forcer le stuff quand vient le temps de créer, si on force le stuff pis on worry about être original pis on worry about qu’est-ce que les petits hypsters de c’te bord-là vont penser about ça. Quand tu poses ces questions-là, tu fais de la marde pis les gens qui écoutent la musique peuvent entendre l’intention dans tout ce que tu fais.
Pour renchérir sur la question de collaboration, P’tit Belliveau partage : « comme je n’ai pas grandi au Québec, la totalité de la output culturelle du Québec ça ne se rend point en Nouvelle-Écosse. Quasiment aucune musique francophone québécoise ne se rend chez nous. Même astheure je suis encore en train de découvrir de la musique québécoise so j’ai pas une liste finie de tous les artistes avec qui je voudrais travailler; je ne les connais pas encore.
En approchant P’tit Belliveau sur les inspirations de son album, il a détaillé : « Everything. Moi j’adore la musique en général, je trouve que la musique c’est fucking awesome. Je me demande pourquoi ça existe, de toutes les manières possibles ça me fascine. J’aime tous les styles, j’aime T-Pain, j’aime Hiroshi Sato, j’aime Blueface, j’aime tout, tout tout, to me everything is good. J’aime qu’on peut la partager, qu’on puisse avoir diverses expériences, différents monologues dans notre tête en écoutant la même chanson à la même seconde. Tout est cool, le achievement qui est possible, les infinites combinaisons de sons.
Farouchement indépendant
Voilà plus d’un an et demi que P’tit Belliveau n’appartient plus à une maison de disque. En lui demandant comment ça se passe, il a étoffé : « C’est great, obviously on fait plus de travail, mais tranquillement on est en train de former une nouvelle équipe et pis ça va peut-être s’agrandir un peu, mais ça reste petit. Pour moi l’indépendance, ce n’est pas de tout faire seul. Par définition, un artiste indépendant, ça veut dire qu’il n’a pas de maison de disques. Ça ne veut pas dire que t’as pas de gérant ou d’autre monde qui sont sur ton équipe pis qui t’aide. Moi j’ai choisi de déléguer la plupart de ces affaires-là, but j’ai choisi de tenir la job de booker, à cause que j’ai réalisé que j’aime ça. C’est pour ça que je fais ça moi-même et ça va super bien. La tournée qu’on commence en avril, c’est la première tournée dans laquelle j’ai tout fait moi-même, toute l’année de shows c’est des shows que j’ai bookés. Je trouve que c’est la best tournée que je vais avoir faite à date, dans le sens de logistique, la qualité des shows qu’on joue, combien de temps qu’on a off entre les shows; generally je trouve que c’est un great tour pis je suis vraiment fier de ça ».
Dans un autre ordre d’idée, P’tit Belliveau désire faire rayonner les artistes acadiens : « Si t’es un artiste acadien, le rêve, la norme, le chemin qui est là pour toi est d’essayer de créer une situation où tu peux attirer l’attention des boîtes québécoises, pour finalement te dire: oh yes ça y est on est un autre groupe montréalais. Moi je veux créer tranquillement un autre système. À part. Qui est basé en Acadie et qui sert l’Acadie. C’est nous-mêmes qui pouvons nous servir le mieux, on connaît nos propres enjeux le best, pis même juste au niveau de la géographie pis de la culture. La structuration des boîtes au Québec pis comment ça marche, ça ne serait pas exactement la même chose en Acadie. Je ne suis pas sûr encore ce serait quoi, mais je sais que ce serait quelque chose de différent. So, je suis intéressé de jouer un petit rôle dans le développement de ce système-là. Je crois que ça commence par inspirer, pis peut-être d’aider, pis de former le monde autour de moi, de leur donner le goût de s’impliquer dans le monde de la musique. Y’a beaucoup de monde dans les maritimes qui sont passionnés de musique. C’est peut-être juste des fans de musique, mais peut-être que ces gens-là aimeraient somehow travailler en musique, but how do you even start? Si moi je peux juste tranquillement jouer un petit rôle dans essayer de former des gens de chez nous, ce serait sick. Ultimately, le but c’est de créer un système alternatif au Québec dans lequel les groupes montréalais veulent move à Moncton ou Halifax. On veut créer un changement de paradigme ».
À noter que P’tit Belliveau sera dans plusieurs festivals cet été dont le Festif!, la Fête Nationale de l’Acadie, le FEQ ainsi que le Festival de la chanson de Tadoussac.
L’album P’tit Belliveau sort le 26 avril.
Crédit photo: Sacha Cohen