Misc
Partager l’ambulance
- Bonsound
- 2021
- 42 minutes
Cinq ans après l’album homonyme, le groupe de jazz qui joue hors des sentiers battus, Misc, nous propose Partager l’ambulance. Quand on parle de jazz (pour les non-initiés) on s’imagine les albums de reprises des mêmes maudits standards ad nauseam. Eh bien, pas ici. Mené par le charismatique pianiste Jérôme Beaulieu, Misc va là où on n’attend pas le jazz.
Je dis « mené », mais il ne faut surtout pas réduire l’importance des deux autres acolytes à ses côtés : Simon Pagé à la basse / contrebasse et William Côté aux percussions et à la batterie. Ce trio est particulièrement talentueux. Pire encore, ils se connaissent très bien. Vous n’avez qu’à les voir en spectacle pour réaliser toute la communication qui passe entre eux, sans qu’une seule parole soit prononcée. C’est un trio qui a des idées de démocratisations du genre comme le prouve la tournée brassicole qu’ils ont faite en 2019.
Cette audace se reflète sur Partager l’ambulance. Déjà le titre fait un clin d’oeil à notre époque. On est un peu pris à « partager l’ambulance » ensemble dans cette pandémie qui nous a offert plus d’une surprise. Tout comme la COVID-19, l’album est surprenant et déroutant par moment. On pourrait montrer le changement de cap marqué environ à mi-chemin d’X-ALT. D’ailleurs, cette dernière est une reprise de SUUNS. Du titre, Beaulieu a dit ceci : « Quoi qu’il en soit, nous partageons cet espace ensemble et il est difficile de ne pas avoir l’impression qu’on se dirige vers un mur en ce moment. »
Jérôme Beaulieu n’hésite pas à mélanger le piano plus classique à des synthétiseurs. Comme il connaît très bien son instrument et est curieux comme ce n’est pas possible, ça donne des résultats franchement rafraîchissants comme Petite apathie où se mélange une trame solide menée par un piano en équilibre entre la percussion et la mélodie et des synthétiseurs aériens. Le tout est soutenu par le brio de la section rythmique. Pagé s’assure qu’on ne manque pas de groove et Côté nous chatouille les oreilles tout en sachant doser.
Il y a une certaine narrativité chez Misc. Une pièce est un chemin qu’on emprunte. Par moment, c’est très défini comme route. Par exemple, Le preacher nous mène tout doucement vers la conclusion avec une mélodie de piano suave et efficace. La même chose se passe sur la dramatique Superman se pointera pas. Quel titre fataliste et réaliste !
Franchement, Misc nous offre encore du solide avec Partager l’ambulance. Le brio des trois musiciens est étayé partout sur les 8 pièces. Pour ceux qui cherchent un jazz qui ose s’aventurer dans l’herbe longue, ce disque est pour vous.