Critiques

Diplo

Diplo Presents Thomas Wesley Chapter 1 : Snake Oil

  • Mad Decent
  • 2020
  • 33 minutes
3

Diplo est un Floridien producteur de certains des plus gros succès pop de la dernière décennie en tant que membre de Major Lazer. Une aisance pour faire lever les foules en liesse, à pondre des bijoux de pop et du bien bon reggae. Pourquoi le country alors ? C’est une idée qu’il a depuis un certain moment, selon lui. Peut-être que la surprise phénoménale qu’a été Old Town Road (qu’il remix d’ailleurs en conclusion de l’album) lui a confirmé que le public était prêt pour un projet complet de pop-country-EDM. Malgré quelques brefs moments, ce premier chapitre de l’histoire de Thomas Wesley (le vrai nom du DJ renommé) est d’une insipidité magistrale.

Le projet est plutôt court pour un album, chaque pièce tourne autour de 3 minutes ou moins, mais sauf exception, on les oublie avant même leur fin. Les rythmes concoctés par l’Américain, essentiellement dilués dans une pop EDM et saupoudrés de basses trap, sont décevants. Puisque toutes les pièces sont si courtes, ça donne une vague impression que le DJ cherche les raccourcis à tout prix. Les refrains reviennent vite et on soupire un peu plus après chaque passage. Comme si chaque pièce était une version édulcorée de Lean On… le producteur troquant son Dhoti Kurta pour un chapeau de cowboy.

La pièce, avec la chanteuse Cam, étonne à quel point elle sonne fade; un faux départ après l’intro intrigante d’Orville Pecker qui aurait pu être le narrateur d’un western des frères Cohen. D’ailleurs, parlons-en des sonorités « country » dans l’album. La plupart du temps, elle se résume à une légère séquence de « fingerpicking » à la guitare acoustique, de discrètes notes d’harmonica et des textes simplistes. Il ne faut pas oublier une vague nostalgie impersonnelle sur fond de soleil couchant (Hometown, Heartbreak, Lonely ). C’est presque irrespectueux de vouloir résumer un style à ses clichés, noyés dans des couches d’électro-pop générique.

Le producteur n’a pas perdu sa touche magique. Il y a des passages de pop brillants durant ce 30 minutes. Dance With Me avec Thomas Rhett est définitivement entraînante, et Young Thug, malgré une apparition si brève, a une prosodie charismatique, comme toujours. Le coup de génie de l’album c’est Do Si Do, aucun doute possible. La voix de Blanco Brown est suave et rêche comme du Jack Daniels alors qu’il devient le temps d’un trois minutes le leader d’une danse en ligne énergique. Ce n’est pas juste hilarant, c’est dansant! La guitare électrique et l’harmonica complètent un succès parfait pour une danse distanciée : un bon vieux « set carré ». Heartless est déchirante grandement grâce à l’interprétation puissante de Morgan Wallen. Julia Michaels et Clever font de Real Life Stuff une ballade pop-country qui se marie parfaitement à l’esthétique trap. Malgré ces quelques bons coups, l’album n’a pas la profondeur d’un projet d’auteur-compositeur ou le panache flamboyant de la musique festive dont Diplo connaît tous les secrets.

De la « Snake Oil », c’est ainsi qu’on surnommait des élixirs soi-disant miracle du 19e siècle qui, au lieu de provenir d’un reptile, était un dérivé de pétrole dans une fiole. Pourquoi Diplo décide d’associer son album Diplo Presents Thomas Wesley Chapter 1 : Snake Oil à ce genre d’escroquerie de charlatans du passé? Après 12 chansons de cette pop avec un stetson en néons, aucune envie de crier au miracle, mais plutôt « Amener le goudron et les plumes! »

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