Critiques

Swervedriver

I Wasn’t Born To Lose You

  • Cobraside / Dine Alone Records
  • 2015
  • 49 minutes
8,5
Le meilleur de lca

SwervedriverSwervedriver est de retour! Longue vie à Swervedriver! Les irréductibles amateurs de la formation britannique attendaient impatiemment ce moment depuis 2008, soit l’année où Adam Franklin a officiellement renoué avec son passé en ressuscitant son légendaire groupe. Cependant, rares sont ceux qui pouvaient prédire en 2008 si la formation allait oser bonifier sa discographie déjà composée de quatre albums pratiquement sans faille. Car avouons-le sans détour, les mélomanes qui connaissent assez bien la genèse du shoegaze des années 90 vous le diront pratiquement tous: les deux premières propositions du groupe – Raise et Mezcal Head, parus respectivement en 1991 et 1993 sur la mythique et défunte étiquette Creation Records – sont tout simplement deux albums cultes dans le style. Les plus enthousiastes s’époumoneront quant à eux à vous vanter les mérites des deux albums suivants, les très sous-estimés Ejector Seat Reservation et 99th Dream.

Pour cette nouvelle proposition, Adam Franklin a réuni les membres originaux du groupe de l’époque post-Raise à l’exception du batteur Jez Hindmarsh. Pour pourvoir ce poste vacant, le groupe s’est tourné vers Mickey Jones. Il s’agit d’un choix assez évident étant donné que Jones est un membre en règle de la formation Adam Franklin & Bolts Of Melody. Grosso modo, on navigue donc dans des eaux connues puisque, de surcroît, Alan Moulder – le fameux cinquième membre du groupe – a lui aussi été impliqué dans le projet en supervisant le processus de mixage de l’album.

Si mon premier contact avec la chanson Deep Wound en 2012 a pu générer chez moi une envie malsaine de faire un prêt bancaire de 6000$ afin de m’acheter une Fender Jazzmaster 1962, la parution d’I Wasn’t Born To Lose You n’aura certainement pas amélioré la situation. Il y a réellement une sorte de chimie qui unit les jeux de guitares d’Adam Franklin à ceux de Jimmy Hartridge. On ne peut que constater la grandeur de cette union, nous simples mortels, sur les chansons Autodidact, Last Rites et For A Day Like Tomorrow. On assiste alors à un véritable bombardement d’harmonies et d’arpèges de guitare, tous épicés à la perfection. À vrai dire, cette séquence parfaite de chansons se poursuit, à notre grand plaisir, avec Setting Sun, Everso et English Subtitles.

«Back in the wrong time» chantait jadis Adam Franklin sur Wrong Treats… Je dirais plutôt l’inverse! Jusqu’à ce que les fondations de la maison se fissurent légèrement pour une première fois sur Red Queen Arms Race. Quand on prend goût à l’excellence, on tolère moins bien les relâchements; surtout quand nos dieux nous proposent une chanson qui s’articule autour d’une idée principale qui n’atteint pas le niveau d’ingéniosité dont le groupe nous a préalablement habitués. Cela n’a guère d’importance, car la bande d’Oxford nous fait rapidement oublier ce faux pas en revisitant la très énergique Deep Wound. Tout va bien, l’honneur est sauf jusqu’aux dernières notes de I Wounder?, où l’on émet enfin un soupir de soulagement.

C’est un triomphe! On frôle la note parfaite, mais trois éléments nous empêchent de nous compromettre: 1) les propositions rythmiques de Mickey Jones, bien qu’efficaces dans leur ensemble, nous font regretter l’absence de Graham Bonnar ou de Jez Hindmarsh; 2) mais où est donc «le» Steve George qui a composé cette ligne de basse absolument géniale sur Blowin’ Cool? Effectivement, la basse aurait davantage pu être mise valeur sur cette nouvelle proposition; 3) la chanson Red Queen Arms Race n’atteint malheureusement pas sa cible.

Donc, de façon générale, on peut bel et bien affirmer qu’I Wasn’t Born To Lose You atteint les standards de qualité retrouvés sur les quatre premiers albums de la formation. Toutefois, lorsque vient le temps de parler de Swervedriver, j’ai toujours une grande difficulté à rester objectif même si je conviens que le concept d’objectivité dans un contexte d’appréciation artistique s’approche dangereusement du domaine du déni. Tout mélomane qui se respecte a ses propres préférences stylistiques qui sont inévitablement influencées par une interprétation assez subjective du concept d’excellence.

Ma note: 8,5/10

Swervedriver
I Wasn’t Born To Lose You
Cobraside/Dine Alone
49 minutes

http://www.swervedriver.com

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