Beyoncé en avait une sur son dernier album. Même chose pour Katy Perry, Jason Derulo, Maroon 5, Kelly Clarkson, Rihanna et Britney Spears. Il y a même Céline qui en avait une sur son dernier album anglophone Les chansons. Je fais référence bien sûr à l’auteure-compositrice-interprète australienne Sia Furler qui n’a jamais eu autant la cote auprès des artistes pop américains et des maisons de disques que maintenant. This Is Acting, son 7e album en carrière, se veut un exercice, une expérimentation, la chanteuse s’appropriant des chansons qu’elle a écrites pour d’autres artistes qui ont été rejetées. Alors que la plupart que des «songwriting teams» du monde aurait relégué aux oubliettes ces chansons, Sia a décidé de les embrasser et de les faire vivre à sa façon.

L’album s’ouvre sur un duo de chansons fortes Bird Set Free et Alive, la première qu’elle lança à Adele, pour lui être retournée, et la seconde coécrite avec cette dernière (et Tobias Jesso Jr.) durant les sessions d’écriture de son album 25. Adele aurait été une super interprète pour ces titres, mais elles sonnent définitivement Sia, avec un texte plus torturé de ce que miss Adkins nous a habitué. Au final, je comprends qu’elles aient été rejetées. Elles sont de très bonnes ballades, mais je ne vois aucune voix dans le monde de la pop qui aurait pu leur rendre justice, mis à part Sia. Un peu plus tard, la dansante Move Your Body (écrite pour Shakira – on croirait l’entendre glousser dans les couplets) change drastiquement le «mood» avec son ambiance dancehall, ses claviers festifs et très Shakira-esque, chanson qui se rapproche le plus de ses collaborations populaires avec les exécrables David Guetta et Flo Rida. Cheap Thrills nous emmène quant à elle au soleil, avec une chanson enjouée et espiègle, qui avait été donnée à Rihanna, mais qui aurait pu facilement atterrir dans le prochain album d’Ariana Grande ou de Major Lazor. Seule chanson écrite pour elle-même, One Million Bullets se démarque clairement du lot, par un texte clair, concis, et une mélodie sur mesure pour la voix inclassable de la chanteuse.

Ensuite, l’album perd de son souffle en milieu de parcours, les chansons devenant un tantinet plus génériques. Je vois très peu d’intérêt à la pièce Reaper (écrite pour Rihanna), une sorte de jingle pour une pub très carrée et de loin la chanson la moins intéressante de cette collection (pensez à une pub de Sunny Delight), chanson écrite avec Kanye West, qui coréalise aussi la chanson. Il y a aussi Sweet Design, une sorte de pastiche des hits de Richard Harrison (Crazy In Love de Beyoncé, 1 Thing de Amerie) qui n’est pas mauvaise, mais qui ne mène nulle part. Footprints (pour Beyoncé) en beurre épais avec ses métaphores maladroites et fromagées à souhait, et House On Fire propose un refrain à faire serrer des dents les plus grands paroliers du monde (I wanna keep burnin’/Baby, my house is on fire). Les pièces Broken Glass et Space Between ferment l’album de façon correcte et reprennent un peu les couleurs du début d’album.

Si This Is Acting est une expérience, elle est à moitié réussie, comme si son auteur n’avait pas réussi à incarner ces chansons écrites pour les autres, ou que, simplement, malgré l’énorme talent de Sia, il y a des idées de chansons qui devraient rester des idées. Sans manquer désespérément de contenu, ce nouveau disque de Sia manque un peu de nuances, la formule “ballade sur la réalisation de soi-même” étant poussée à l’extrême. Elle a déjà démontré plus de souplesse, de fougue et de cran. On ne fait que réécouter ses avant-derniers albums 1000 Forms Of Fears ou We Are Born pour s’en rendre compte. Néanmoins, ce 7e album devrait réussir à combler les fans de la mystérieuse et créative Australienne.

Ma note: 6,5/10

Sia
This Is Acting
Monkey Puzzle / RCA
47 minutes

http://siamusic.net/

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