Critiques

Kurt Vile

Wakin On A Pretty Daze

  • Matador Records
  • 2013
  • 71 minutes
8,5
Le meilleur de lca

Aujourd’hui, c’est la parution du cinquième album du songwriter américain, originaire de Philadelphie en Pennsylvanie, nommé Kurt Vile. Il y deux ans, le musicien avait fait paraître Smoke Ring For My Halo; création qui avait valu une place de choix dans la liste des dix meilleures offrandes de 2011 de votre humble critique. Kurt Vile élabore un style musical alliant le folk et le rock à quelques éléments de shoegaze; mais ce qui caractérise l’auteur-compositeur-interprète ce sont les inflexions vocales et ces mélodies atypiques, détachées et nonchalantes qui pourraient être comparées à une mixture de Bob Dylan et Jay Mascis de Dinosaur Jr. D’album en album, la musique de Vile se bonifie sérieusement…

Et ce Wakin On A Pretty Daze ne fait pas exception à la règle; tant s’en faut! Réalisé de nouveau par le comparse tirant les ficelles sur Smoke Ring For My Halo, John Agnello, ce disque est intemporel et obtiendra certainement le même impact lorsqu’il sera entendu dans trente années d’ici! Kurt Vile se lance dans plusieurs pièces épiques dépassant largement le cadre chansonnier dit radiophonique. Le premier extrait, le sublime et touchant Wakin On A Pretty Day, qui s’achève sur un long, mais magnifique solo de guitare, met superbement la table au premier grand album de Kurt Vile.

Au menu, des guitares folk noyées dans la réverbération, des guitares électriques aux effets hypnotiques, une performance sans bavure des Violators (groupe qui accompagne Vile sur cette œuvre), des mélodies léthargiques qui s’incrustent sournoisement dans le cortex cérébral, et surtout, une réalisation monumentale de John Agnello qui a su incorporer claviers, effets sonores et boucles électroniques avec une subtilité et un jugement qui l’honore.

Une création qui demandera un effort d’écoute approfondi de la part des mélomanes, puisque les chansons composées pour cet opus sont animées par des changements de rythmes brusques et des improvisations-fleuves, dans lesquelles les musiciens qui escortent Vile offrent une prestation de haut niveau. Ceux qui éprouvaient une certaine retenue quant au penchant «slacker» du créateur pourraient être séduits par ce Wakin On A Pretty Daze, car curieusement, Vile nous présente son disque le plus accessible et le moins paresseux de tout son corpus.

Le voyage cannabisant débute avec la géniale Wakin On A Pretty Day (mentionnée précédemment); un très grand morceau. Par la suite, Vile enchaîne avec une assez rock KV Crimes, la très War On Drugs (ex-formation dans laquelle évoluait Vile) Was All Talk et le folk rock frissonnant A Girl Called Alex dans lequel Agnello fait entrer dans le mix une déflagrante guitare électrique. Ça se poursuit glorieusement avec la simple, mais efficace Never Run Away, la labyrinthique Pure Pain, le folk épuré Too Hard et le quasi-pop-rock Shame Chamber… et ça se conclut admirablement bien avec la très Kurt Vile (voire la progression d’accord emblématique) Snowflakes Are Dancing, les rythmes électros enfiévrant Air Bud et la langoureuse mais frémissante Goldtone.

Tout en demeurant ancrer dans une certaine tradition issue du folk-rock américain (Young, Dylan, Springsteen), Kurt Vile a les deux pieds solidement plantés dans la modernité. Il nous sert ici un grand disque de rock hypnotique, narcotique, ambitieux, authentique, qui ne tombe jamais dans la grandiloquence et qui est à l’épreuve du temps. Un album qui inspire la fuite et le road trip hallucinant. De toute beauté! Indémodable!

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