Cherubs
2 Ynfynyty
- Brutal Panda Records
- 2016
On poursuit le rattrapage des albums décisifs de 2015 (et qui n’ont pas été critiqués sur LCA) avec Cherubs, les parrains du noise rock.
Voilà un retour pour le moins bien senti pour le trio d’Austin au Texas, lui qui s’est dissous quelques temps avant la parution de son essentiel Heroin Man, en 1994. 20 ans plus tard Kevin Whitley, Owen McMahon et Brent Prager, reprenaient du collier probablement pour montrer à Your Favorite Enemies ce qu’est du vrai noise rock (le groupe de puceaux chrétiens de Varennes prétend s’inscrire dans ce genre, ce qui mérite en soi une correction: http://yourfavoriteenemies.com/main/wp-content/uploads/2018/01/noiserockbanner.jpg) Je sais, c’est chien, mais vous ne me ferez pas croire que du Incubus javelisé d’enfants gâtés, ça s’inscrit dans le son des Cherubs et autres Jesus Lizard.
Donc, tout ça pour dire que 2 Ynfynyty était un album qu’on n’attendait pas, mais qui nous a globalement «passer à la hose à compression». «Nous» étant ici les quelques chanceux qui ont pu mettre la main sur l’une des copies vinyles d’un des (minimes) tirages de Brutal Panda Records.
Et ça commence en envoyant du très très gros avec Sandy On The Beach, pièce Nirvana-esque s’il en est une, si Kurt avait joué un tant soit peu, «tuné» ben bas et avec les «grosses cordes» (bref y’a que l’énergie déployée qui évoque le martyr groupe de Seattle). Crashing The Ride poursuit l’assaut avant une première cassure au rythme effréné: Monkey Chow Mein, un des meilleurs titres ici.
C’est lent, c’est écrasant, mais c’est aussi aérien comme un vol avec El Cheapo dans une mer de turbulences, on s’entend. La raison tient ici principalement dans le ton de la guitare: il est incroyablement défini malgré son important pourcentage en matière grasse. On aime aussi le vocal tantôt cassant, tantôt «slacker», presque désintéressé-à-la-Lou-Barlow.
On retrouvera cette formule, d’anti-assaut, sur d’autres morceaux comme l’incontournable Cumulo Nimbus. Et voilà les moments les plus intéressants de 2 Ynfynyty.
Car même lorsque Cherubs étire le chrono au-delà des quatre minutes (trois morceaux font même au-delà de six minutes), ça ne s’essouffle pas. Le trio n’a pas peur de varier son arsenal et d’alterner les riffs de destruction massive par de vrombissants larsens ou encore par un inquiétant fuzz généreusement passer dans la toujours d’adon pédale de Delay.
Pendant plus de 40 minutes, on est captivé par la proposition des Texans. On y entend plein de choses que l’on aime, qui nous évoquent d’autres sons, sans pour autant nous faire décrocher de notre écoute active. Il n’y a pas à dire, les maîtres sont débarqués pour reprendre leur dû!
Pour dire vrai, à l’écoute de 2 Ynfynyty, ce serait mesquin que de conclure que le groupe s’est reformé pour autre chose que pour cette envie de faire du bruit.
Je cite d’ailleurs à ce propos BLT, le docteur ès fuzz: «Dude, l’industrie du disque a droit à tellement de comebacks ridicules. Cherubs, eux, se sont même pas posé la question: ils ont juste crissé du bruit sur un disque.»
Voilà qui est dit. Et je doute anyway que le trio soit déjà allé à Varennes…
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