Critiques

Yonatan Gat

American Quartet

  • Mothland
  • 2022
  • 36 minutes
7

Yonatan Gat est ce guitariste expérimental israélien — aujourd’hui résident de New York — qui a participé activement à l’élaboration de l’album éponyme des Medicine Singers; un long format lancé l’été dernier. Les Eastern Medicine Singers sont un ensemble vocal algonquin natif de la région du Rhode Island dont la démarche s’appuie sur la tradition du pow-wow. Gat a insufflé sa vision résolument rock d’avant-garde et sa forte personnalité à ce projet franchement intéressant.

La semaine dernière, l’instrumentiste était de retour avec une autre de ses aventures uniques en son genre. Il nous présentait American Quartet, une relecture de l’opus du compositeur Antonín Dvorák intitulé Quatuor à cordes no. 12. Une œuvre marquante du répertoire de la musique classique. L’œuvre de Dvorák, écrite en 1893, était de prime abord destinée pour être jouée par deux violons, un alto et un violoncelle. Or, pour Gat, cette pièce a toujours recelé un fort esprit rock and roll.

Enregistré en une seule journée, sans l’aide de pistes supplémentaires ou de retouches, American Quartet a bénéficié de l’apport de musiciens de renom : le batteur-virtuose Greg Saulnier (Deerhoof), le bassiste Mikey Coltun (Mdou Moctar) et le claviériste Curt Sydnor qui, pour cette occasion, a axé son jeu sur un orgue Hammond.

Avant de réunir ses acolytes dans le but d’interpréter l’œuvre de Dvorák, le guitariste s’est immergé dans la musique de la compositrice et interprète de musique électronique Wendy Carlos, celle-là même qui a écrit la trame sonore du chef-d’œuvre du cinéaste américain Stanley Kubrick, Orange Mécanique (1971).

Gat ne lit pas la musique. Il a donc dû apprendre et mémoriser sa partition à l’oreille grâce aux bons conseils du bassiste Mikey Coltun. Cette inaptitude lui a permis de se libérer de la partition laissant ainsi libre cours à son jeu indomptable et imprévisible.

Pour sa part, le batteur Greg Saunier interprète les parties de violoncelle de manière décomplexée et offre une performance à couper le souffle… comme d’habitude ! Ce sont la basse de Coltun et l’orgue de Sydnor qui représentent les assises référentielles à l’œuvre de Dvorák. Le premier met de l’avant toute la puissance de son jeu que l’on peut entendre sur les albums de Mdou Moctar et le deuxième propose l’interprétation la plus nuancée du quatuor.

American Quartet est une création qui peut s’écouter d’un seul trait sans vraiment connaître le morceau de Dvorák. Toutefois, si le cœur vous en dit, on vous suggère fortement de prêter l’oreille aux deux compositions l’une à la suite de l’autre. Ainsi, vous décèlerez les ressemblances, qui sont nettement plus définies dans les parties introductives, tout en appréciant les performances délirantes de Saunier et Gat.

Sans être une grande relecture de ce Quatuor à cordes no. 12, American Quartet est l’instantané d’une solide performance de quatre musiciens en parfaite maîtrise. Un objet de curiosité somme toute assez intéressant.

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