Critiques

The Brian Jonestown Massacre

Fire Doesn’t Grow on Trees

  • 'A' Records
  • 2022
  • 38 minutes
8
Le meilleur de lca

Après plus de 30 ans de carrière au compteur, Anton Newcombe récolte les fruits de son dur labeur. Cet admirable entêtement à rejeter les codes promotionnels de l’industrie du disque, cette liberté et cette intégrité absolues font de lui un artiste qui suscite de plus en plus l’admiration de ses pairs. Son véhicule créatif, The Brian Jonestown Massacre, fédère en catimini un nombre grandissant d’admirateurs, et ce, d’album en album. Qui aurait pu prédire un tel parcours pour cet être troublé, aux prises avec de sérieux problèmes de consommation, que plusieurs avaient tourné en dérision suite à la parution du controversé documentaire Dig (2004) ? Personne ne donnait chair de la peau de Newcombe à l’époque…

Après une pause de deux ans (ou presque), le vétéran rockeur, âgé de 54 ans, est de retour avec un 19e ou 20e album en carrière. On ne les compte plus ! Pendant cette pause, il en a profité pour réaliser l’excellent Diabolique (2019) de la formation française L’Épée qui compte dans ses rangs l’actrice Emmanuelle Seigner ainsi que Lionel et Marie Limiñana (The Limiñanas).

Newcombe va admirablement bien ! Aujourd’hui, le songwriter souhaite consacrer ses énergies sur le seul combat qui, selon lui, vaut réellement la peine : l’amour. Fire Doesn’t Grow on Trees pourra paraître messianique et mégalomane pour certains cyniques et rabat-joies. Or, c’est bien mal connaître l’artiste qui ne cherche dorénavant qu’à faire du bien avec ses chansons.

Enregistré dans son studio personnel localisé à Berlin, ce long format est un retour aux sources psychédélique comparativement à des albums plus « expérimentaux » comme Aufheben (2012), Revelation (2014), Third World Pyramid (2016) ou Don’t Get Lost (2017). Le mouton noir du rock psychédélique a écrit et composé pas moins de 70 chansons avant de réunir autour de lui un nouveau groupe formé majoritairement de musiciens scandinaves. Les deux derniers efforts de la formation — Something Else (2018) et The Brian Jonestown Massacre (2019) — laissaient présager ce retour au rock lysergique plus musclé.

En fait, ce qui différencie Fire Doesn’t Grow on Trees des deux parutions susmentionnées, ce sont les ascendants space-rock à la Spiritualized de même que la puissance déployée par la formation qui accompagne Newcombe. La combinaison des trois guitares électriques et des claviers moyen-orientaux élargit le mur de son de la formation.

Le morceau introductif intitulé The Real — l’une des plus grandes pièces du répertoire du groupe — est une indication claire dans quel état d’esprit le Berlinois d’adoption et ses nouveaux frères d’armes souhaitent nous escorter. Ineffable Mindfuck plonge dans le rock motorik tripatif grâce aux nombreuses couches de guitares distordues. It’s About Being Free est un clin d’oeil admiratif à l’un des plus grands « rock’n roller » de tous les temps, Bo Diddley. Newcombe nous présente même deux vigoureuses ballades que n’auraient pas reniées un Jason Pierce (Sprititualized) ou encore la formation Iceage : What’s in a Name ? et Before and Afterland. Enfin, il est impossible de ne pas être convaincu avec des morceaux juste assez « fuzzés » comme Wait a Minute (230 to Be Exact) et Don’t Let Me Get in Your Way.

Longtemps considéré comme un indécrottable passéiste, Anton Newcombe est maintenant moulé à une époque carburant à la nostalgie et en déficit d’icônes honnêtes et rebelles à la fois. Cet homme est un survivant qui nage à contre-courant des modes et tendances et il est train de réussir son pari : être enfin reconnu et respecté.

Fire Doesn’t Grow on Trees défie encore une fois toute catégorisation.

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