Critiques

Swans

Leaving Meaning

  • Young God Records
  • 2019
  • 93 minutes
8
Le meilleur de lca

Âgé aujourd’hui de 65 ans, Michael Gira aurait pu stopper net sa production artistique avec la parution de ce trio de poids lourds que sont The Seer (2012), To Be Kind (2014) et The Glowing Man (2016). Ces trois œuvres intransigeantes, mais magistrales, ont catapulté le doyen dans le firmament des plus grands musiciens et compositeurs de l’histoire du rock; cet art mineur, snobé par plusieurs, mais qui, sous la houlette de ce chaman, se transforme en une pertinente quête spirituelle.

Trois ans après avoir sabordé la version intraitable et menaçante de Swans, Gira réanime l’animal. Seuls les rescapés Norman Westberg et Kristof Hahn sont de retour. Le vétéran a rameuté 18 musiciens pour l’escorter dans sa nouvelle aventure, incluant Thor Harris (partenaire dans le projet Angels of Light), le compositeur et ingénieur de son australien Ben Frost ainsi que son épouse Jennifer Gira.

Laissons Gira nous expliquer la démarche qui a mené à la gestation de cette nouvelle création : « Leaving Meaning est le premier album de Swans qui paraît depuis que j’ai dissous l’alignement de musiciens qui constituait le groupe entre 2010 et 2017. Swans est désormais composé d’une distribution de musiciens renouvelés, tous sélectionnés pour leurs qualités musicales autant que pour leurs personnalités et choisis en accord avec ce que je crois être l’esprit du groupe. En collaborant avec moi, les musiciens, à travers leurs personnalités, goûts et qualités, contribuent énormément à l’arrangement des morceaux. Ce sont tous des gens dont j’admire le travail et dont j’estime tout particulièrement la compagnie. »

Un album de Swans demande toujours un investissement d’écoute de tous les instants. Leaving Meaning ne fait pas exception à la règle. Cette nouvelle œuvre est assurément plus capricieuse. Les puissantes salves de distorsion, divinement martelées, se font plus rares. Les crescendos et les mantras se développent de manière plus subtile; une délicatesse sournoise…

Gira nous conduit dans un univers contemplatif, forcément moins percutant, mais qui, au fil des écoutes, se révèle presque aussi gratifiant que la trilogie mentionnée ci-haut. Il y a bien The Hanging Man, Some New Things ou encore la sublime Sunfucker pour nous remémorer la force de frappe coutumière du groupe, qui elle, s’appuie constamment sur une répétitivité aliénante. Il y a aussi The Nub; cette superbe progression qui nous rappelle à quel point la recette « volcanique » de Swans fonctionne toujours aussi bien.

Mais Leaving Meaning connaît aussi quelques passages à vide. Le premier extrait titré It’s Coming It’s Real et la faussement rassembleuse What is This ? sont des pièces plutôt ennuyantes. Sans ce pilonnage décapant, sans cette violence sonore si caractéristique de Swans, il est difficile de rester attentif à l’écoute des propositions répétitives de Gira. En revanche, quand le sorcier nous escorte vers une sorte de folk minimaliste / aérien (Annaline et Amnesia), on est magnifiquement conquis.

Qu’à cela ne tienne, Leaving Meaning écrase de tout son poids créatif la vaste majorité des parutions perpétrées dans le merveilleux monde du rock. Ce nouveau périple ne procure pas les grandes chaleurs de To Be Kind, mais il contient assez de substance pour satisfaire le mélomane aventureux.

Gira consolide sa place parmi les grands du rock.

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