Sur la scène du R&B américain, des noms comme serpentwithfeet sont susceptibles de ne vous faire sonner aucune cloche. Pourtant, Jonathan Josiah Wise, actif depuis environ 2016, a réussi à amasser une fanbase solide grâce à un R&B épuré, actuel et sophistiqué. Son premier album soil, paru en 2018, avait particulièrement fait des vagues chez les critiques, s’étant ainsi taillé une place dans les classements des meilleurs albums de 2018. Malgré le fait qu’il n’a jamais eu (du moins, pour l’instant) un véritable hit chez le grand public, son art personnel et réconfortant font que, finalement, la célébrité, ce n’est que secondaire. Ainsi, avec GRIP SEQUEL, la réédition de son dernier projet GRIP, sortit l’année dernière à (presque) pareille date, nous avons un artiste fidèle à lui-même et très confortable dans son médium. D’ailleurs, pour les besoins de la critique, je me concentrerai sur les neuf morceaux nouvellement parus. Et qu’à cela ne tienne, car ces additions inédites au GRIP original sont un renforcement de son contenu original, sans prise de tête et sans prétention.

Il est vrai que le GRIP SEQUEL ne réinvente rien. C’est un album simple et assez sécuritaire. Il y a, en revanche, un détail qui ressort triomphant de ce projet : la sérénité. Rien qu’en voyant la pochette (adorable) du disque, on peut en déduire une chose : serpentwithfeet est heureux. Et il a bien raison de l’être. Avec des morceaux comme SEAGULL et WANDERER, nous n’avons qu’à fermer nos yeux et à profiter d’une douceur qui fait du bien. WANDERER, en particulier, nous enveloppe avec ses notes de piano délicates et la voix de serpentwithfeet qui résonne dans nos cœurs comme un baume. Par ailleurs, WRITHING IN THE WIND, malgré sa durée trop courte, met le mot « actuel » dans le « R&B actuel » que je mentionnais plus tôt. Nous avons droit à une rythmique jersey drill très tendance sur un fond musical plus épuré et calme. Ça change, et la nouveauté, on l’accueille à bras ouverts. Malheureusement, dans sa première moitié, GRIP SEQUEL se repose souvent sur ses lauriers et peine à se démarquer comme espéré. BEG QUIETLY, par exemple, introduit relativement bien l’album, mais ne vole pas plus haut que cette simple fonction. De plus, d’autres morceaux comme PILLOW TALK, en revanche, sont agréables, mais ne sont pas plus marquants que ça et passent dans le fond sans marquer au fer rouge notre imaginaire.

Et, réédition oblige, nous avons droit à une panoplie de remixes, ces variations spéciales de chansons déjà présentes sur GRIP. Je donne ma mention spéciale à la nouvelle version de SPADES, avec Ogi et DESTIN CONRAD. L’alchimie, sans être révolutionnaire, fonctionne parfaitement, et on se laisse bercer sans problème. Mais ce n’est pas tout! À ma grande surprise, nous avons même droit à un remix baile funk de DAMN GLOVES, avec Azzy et Ty Dolla $ign. Alors, oui, ça marche plutôt bien, mais je me pose quand même la question quant à son inclusion sur cet album. Certes, cela permet à serpentwithfeet de nous offrir une myriade de sonorités en peu de temps, mais le fait est que ce remix détonne un peu du reste. Heureusement, la version « strings » (cordes) de LUCKY ME fait mouche, et offre quelque chose d’inattendu et de très chic.

Alors non, GRIP SEQUEL n’est pas parfait dans son exécution, car jouant des cartes déjà convenues à certains moments. N’empêche que cela reste du R&B parfaitement adéquat et agréable. Tous les albums de serpentwithfeet ne sont pas obligés d’être des redites de soil ou encore DEACON. Parfois, le minimaliste peut être la clé dans un monde ou le grandiloquent peut devenir grotesque. Alors, en ce début du mois de mars, profitons un peu de cet élan de simplicité.